lundi 7 novembre 2016

Kafka sur le rivage - Haruki Murakami

- Et pour l'argent, ça s'est arrangé ? demande le garçon nommé Corbeau. [H.M.]
Le site VendrediLecture dans son petit jeu du lundi soumettait le défi de décrire notre lecture à l'aide de six mots, ni plus ni moins. Lisant à ce moment-là Kafka sur le rivage, j'ai soumis « Conte initiatique, métaphore de la vie». (ici) Cela me paressait assez juste. Mais Murakami, dès les premières pages, nous offre aussi un résumé du roman :
Le jour de mes quinze ans, je ferai une fugue, je voyagerai jusqu'à une ville inconnue et lointaine, et trouverai refuge dans une petite bibliothèque. [H.M.]
Et pour la métaphore, qui revient tout au long de notre lecture, Murakami prend Goethe à témoin :
Comme disait Goethe, la création tout entière est une métaphore. [H.M.]
Je mettrais en exergue plein de passages de Kafka sur le rivage. C'est une lecture qui m'a accompagné pendant un bon moment, le roman fait un bon nombre de pages, mais elle a occupé aussi mes réflexions, mes regards sur moi et sur le monde.
Tout en ce monde est constamment en mouvement. La Terre, le temps, les idées, l'amour, la vie, la foi, la justice, le mal. Tout est fluide, tout est transitoire. Rien ne reste éternellement au même endroit, sous la même forme. L'univers lui-même est une sorte d'énorme service postal. [H.M.]
Montaigne, à ce sujet, n'écrivait-il pas : Le monde est une branloire pérenne. Toutes choses y branlent sans cesse [...] La constance mesme n'est autre chose qu'un branle plus languissant? Des siècles de distance, des mondes différents, et pourtant un regard semblable.
- Ce qui est en train de se passer n'est pas ta faute, dit-il. Ni la mienne. Ni la faute d'une prédiction ou d'une malédiction. Ni de l'ADN, ni de l'absurdité du monde, ni du structuralisme, ni de la troisième révolution industrielle. Si nous mourons et disparaissons, c'est parce que le monde repose sur un mécanisme d'anéantissement et de perte. Nos existences ne sont rien d'autre que les ombres projetées par ce principe. [H.M.]
Haruki Murakami est amateur de musique, amateur de jazz, de classique, de rock, amateur de musique, quoi. Cela est présent dans toute son oeuvre et à ce titre, Kafka sur le rivage ne fait pas exception. La musique nous accompagne, que ce soit Crossroads par Cream, une oeuvre pianistique de Schubert, du Duke Ellington, le trio « À l'Archiduc » de Beethoven avec Rubinstein, ou Sergent Pepper's Lonely Hearts Club Band parmi plein d'autres pièces. Certains ont fait des compilations des morceaux de musique qui parsèment l'oeuvre de Murakami, on peut y consacrer plusieurs heures d'écoute.
Un corbeau crie à tue-tête au-dessus de moi. Ce cri perçant serait-il un avertissement, à moi destiné? [H.M.] 
Par-delà le bord du monde, il est un espace où le vide et la substance se superposent, où passé et présent forment une boucle. [H.M.]
Est-il nécessaire que je précise que l'univers de Murakami m'a séduit? Je fais le souhait que vous le croisiez dans une lecture prochaine.

__________________

À propos des écrits de Murakami, sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Murakami

Haruki

1Q84 

31/07/2015

Murakami

Haruki

La ballade de l’impossible

29/01/2018

Murakami

Haruki

La course au mouton sauvage

28/09/2022

Murakami

Haruki

Le Meurtre du Commandeur

26/05/2019

Murakami

Haruki

Le passage de la nuit

07/02/2017

Murakami

Haruki

L’éléphant s’évapore

27/07/2017

Murakami

Haruki

Les amants du Spoutnik

27/11/2019

Murakami

Haruki

L’étrange bibliothèque

21/10/2016


lundi 31 octobre 2016

C'était demain - Edward Bellamy

 [Archives Juillet 2007]
J'ai vu le jour dans la ville de Boston, en l'année 1857. «1857, dites-vous? C'est une erreur; il veut sans doute dire 1957.» [E.B.]
Voilà un livre que j'avais offert à mon fils après en avoir entendu une présentation par Normand Baillargeon, l'édition est d'ailleurs présentée et annotée par Normand Baillargeon et Chantal Santerre. C'est une science-fiction sociale et politique, une utopie idéaliste. Bellamy présentait dans un futur qui n'était pas si loin de lui une société fonctionnant selon des principes auxquels il croyait et qu'il défendait. Il a utilisé la fiction pour illustrer ce monde qu'il espérait meilleur et plus juste. Le procédé est efficace et il semble que Looking Backward a eu un effet considérable au moment de sa parution en 1887. Il demeure mystérieux que l'impact n'ait pas franchi le mur des langues et que le milieu francophone ait gardé aussi peu de traces de cet écrit.

vendredi 21 octobre 2016

L'étrange bibliothèque - Haruki Murakami

La bibliothèque était beaucoup plus silencieuse qu'à l'ordinaire. [H.M.]
Alors que je commente cette lecture d'il y a quelques jours, je lis Kafka sur le rivage du même Murakami, et je retrouve un jeune, une bibliothèque et un passage initiatique. La lecture de Kafka sur le rivage est toutefois moins déconcertante que celle-ci, pour l'instant. Mais, je crois savoir que chez Murakami, le fantastique se cache dans les replis du réel. L'étrange bibliothèque se loge presque entièrement dans un tel repli.

Un jeune garçon, amateur de lectures et de livres, se rend à la bibliothèque pour remettre deux emprunts récents, s'informant à propos de la recherche d'un nouveau livre, il est dirigé vers la salle 107 au sous-sol. C'est là que l'étrange entre en scène et que nous sommes conviés dans un labyrinthe cauchemardesque où on croisera un vieux bibliothécaire, un homme-mouton et une jolie fillette.

Cette lecture, agrémentée des illustrations de Kat Menschik, se fait dans un court laps de temps, mais cet espace de temps se trouve suspendu quelque part entre le rêve et l'imaginaire.
La nuit de la nouvelle lune se manifesta furtivement, sans bruit, comme un dauphin aveugle. [H.M.]
____________________

À propos des écrits de Murakami, sur Rives et dérives, on trouve:

Murakami

Haruki

1Q84 

31/07/2015

Murakami

Haruki

Kafka sur le rivage

07/11/2016

Murakami

Haruki

La ballade de l’impossible

29/01/2018

Murakami

Haruki

La course au mouton sauvage

28/09/2022

Murakami

Haruki

Le Meurtre du Commandeur

26/05/2019

Murakami

Haruki

Le passage de la nuit

07/02/2017

Murakami

Haruki

L’éléphant s’évapore

27/07/2017

Murakami

Haruki

Les amants du Spoutnik

27/11/2019



samedi 15 octobre 2016

Le bâton d'Euclide, le roman de la Bibliothèque d'Alexandrie - Jean-Pierre Luminet

[Archives Janvier 2003]
Sous le fin croissant de lune, deux hautes tours jumelles découpaient leur silhouette encadrant le portail de la ville close. [J.-P. L.]
J'ai adoré ce roman historique qui narre avec certaines largesses avec l'Histoire la Bibliothèque d'Alexandrie. On y raconte les personnages qui y ont travaillé, les conflits qu'elle a générés, les espoirs de savoir infini, les heurts religieux et une série d'anecdotes plus ou moins réelles. En effet, l'auteur avoue avoir provoqué des rencontres qui n'ont pas vraiment eu lieu, avoir accordé à certains acteurs des rôles qu'ils n'ont pas tenus mais qu'ils auraient très bien pu tenir, avoir imaginé des dialogues que personne n'a pu entendre. Faute avouée est à moitié pardonnée. Mais, est-ce vraiment une faute? L'auteur écrit, sans prétendre autre chose, un roman, un roman qui croise plus d'une fois l'Histoire, mais tout de même un roman.

dimanche 9 octobre 2016

La fourmi assassine - Patrice Pluyette

Comme Gisèle Prunier n'avait pas disparu mais cherché à disparaître pour savoir comment Odile Chassevent avait disparu, on en sut un peu plus sur Odile qui avait été l'amie de Gisèle et devait se présenter pour dîner chez celle-ci à vingt heures avec un dessert le jour de sa disparition, laquelle perspective (le dîner, pas la disparition - à moins que Gisèle fut dans le coup mais nous essayerons de ne pas imaginer que si) enthousiasmait les deux jeunes femmes chaque premier week-end du mois quand Gisèle n'était pas de garde, Odile surtout cette fois-là, en témoigne son texto rédigé le jour même mais pas envoyé, enregistré à quinze heures dans le brouillon de son téléphone portable qu'un agent de la voirie retrouve le 4 du mois sans boîtier, juste la carte Sim pilonnée, incrustée dans les crampons d'une botte au fond d'une poubelle recouverte par les ronces sous le chemin vicinal dit rue du Pont Prolongé. [P.P.]
Étrange roman, énigmatique écrit, un conte policier où l'auteur semble vouloir nous mettre à défi de recoller des morceaux épars, des pièces de puzzle en creux alors qu'on trouve des pièces présentant des excroissances, mais où sont les morceaux de coins et de bord, on ne voit en partance que des mots alignés alors qu'une idée se profile et s'insinue à travers la matière des courts chapitres, et puis on avance à tâtons, on découvre un fil, on sent un récit, il y a une histoire, peut-être plus qu'une, et puis on en sort un peu secoué par le style échevelé, par les énumérations signifiantes et porteuses, par une narration éclatée qu'on réussit à organiser au cours de la lecture. Expérience particulière que cette lecture, mais expérience agréable.
Avant de se lever, il avait laissé un blanc, et à partir du moment où il se mit debout il n'arrêta pas de circuler dans la pièce, de brasser l'air, de prendre des objets dans sa main, de dire des choses pour en savoir d'autres. [P.P.]
Feuillage, faille, fouille, fond, battue, bocage, marais, mare, marécage, étang, lac, patrouille, ratissage, quarante, gendarme, plongeur, périmètre, sécurité, zone, sonde, rayon, hélicoptère, champ, sous-bois, bois, contrescarpe, clairière, parc, arbre, lierre, pelouse, mousse, puits, trou, tour, contour, cour, arrière-cour, cabanon, comble, [...], cynophilie, cybernétique, cornue, cryogénie, ciguë : aucune trace d'Odile Chassevent nulle part - ongle, cheveu, salive, sueur, ADN, rien. [P.P]

_______

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :


Pluyette
Patrice
La Vallée des Dix Mille Fumées