lundi 13 mai 2019

Meursault, contre-enquête - Kamel Daoud

Aujourd'hui, M'ma est encore vivante. [K.D.]
L'Arabe abattu par Meursault vers 14 heures sur une plage trop ensoleillée dans L'étranger de Camus a un nom. Comment se fait-il que si peu de gens s'y soient intéressés? Il s'appelle Moussa. C'est son jeune frère Haroun qui nous le fait savoir dans ce roman-miroir, dans cette réponse, dans cette suite inattendue, dans cette réappropriation, dans cet hommage en forme de critique. Kamel Daoud donne la parole à Haroun qui, dans un long monologue, nous raconte les événements à sa manière, mais qui, aussi, nous laisse à savoir sa peine, son désarroi, son trouble face à l'absence, face au vide qu'a laissé Moussa dans sa vie et celle de sa mère. C'est en quelque sorte la confession d'un vieil homme qui, après plein d'années, sent le besoin de réagir, de se dire.

Cela aurait pu n'être qu'un exercice de style, il m'apparaît plutôt que Meursault, contre-enquête va plus loin, porte un discours, engage une lecture du réel qui constitue une oeuvre en soi.

Lis ce qu’a écrit ton héros à propos de son séjour en cellule. Moi, je relis souvent ce passage, c’est le plus intéressant de tout son fatras de soleil et de sel. C’est dans sa cellule que ton héros pose le mieux les grandes questions.  [K.D]

Elle m’apprit à lire le livre d’une certaine manière, en le faisant pencher de côté comme pour en faire tomber les détails invisibles.  [K.D.]
_______________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Camus
Albert
L’étranger

L'étranger - Albert Camus

Aujourd'hui, maman est morte. [A.C.]
Lu pour la première fois à la fin de l'adolescence, je ne gardais pas de ce roman un souvenir très clair, sinon la trame simple de l'histoire qui s'y déroule. Je ne me souvenais pas spécialement de la plume de Camus. À ce nouveau contact, cette plume, cette façon d'écrire, m'a semblé particulièrement dépouillée dans la première partie tout du moins, dépouillée, presque vide, à devenir en quelque sorte ennuyeuse. Sujet, verbe, complément, descriptions sèches, détachées, presque télégraphiques. C'est probablement en lien avec l'indifférence, l'indolence, la distance que le personnage principal, Meursault, maintient avec le monde et avec lui-même. Cela m'a tout de même déstabilisé.

Même devant le geste qu'il pose, le meurtre d'un Arabe, même devant l'enquêteur ou le tribunal, ou devant sa propre vie, Meursault reste impassible, ambigu, indiscernable. Le personnage-narrateur explique sans expliquer, nous laisse avec nos questionnements et nos interprétations. Lecture importante pour sentir l'existentialisme, pour prendre acte de l'absurdité qui s'incarne.

Il m'était important de relire L'étranger parce que je voulais le revoir par l'oeil de Kamel Daoud dans Meursault, contre-enquête, une lecture qui m'avait été suggérée par une amie que je m'empresse de remercier.

mercredi 8 mai 2019

La petite fille en haut de l'escalier - François Gravel

J'ai deux ans, pas plus. [F.G.]
François Gravel met ici sa plume dotée d'une écriture simple et son don pour nous raconter des histoires pour emprunter un nouveau registre en nous narrant des éléments de souvenirs. En fait, il s'agit du récit de sa mère qui, née en 1916, a été élevée dans un presbytère par un oncle curé avec les contraintes que cela peut supposer et la cuirasse qu'elle s'est alors construite.  Cuirasse qui se traduira dans son insensibilité aux émotions des autres et, par là, dans une incompétence certaine au rôle de mère qu'elle a pourtant eu à tenir pour six enfants issus d'un triste mariage. François Gravel raconte sa mère par divers épisodes et anecdotes et il porte un regard critique sur sa relation avec elle peut-être pour se délester d'un questionnement et d'un état d'âme qui bouleversent. Peut-il pardonner à sa mère de l'avoir peu aimé?

Mais, entendons-nous, bien qu'intéressant et de lecture aisée, ce n'est pas le meilleur opus de François Gravel.

_________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :


Gravel
François
À vos ordres, colonel Parkinson

Gravel
François
Fillion et frères 

Gravel
François
Vous êtes ici
Gravel
François
Voyeurs, s’abstenir 

lundi 29 avril 2019

101 expériences de philosophie quotidienne - Roger-Pol Droit

Ce livre est un divertissement. Cela signifie qu'il essaie d'indiquer l'essentiel de manière légère. [...] Le futile donne à penser, le dérisoire conduit au sérieux, la profondeur part du superficiel. Pas toujours, pas nécessairement, cela va de soi. [R.-P.D.]
Ce livre se trouvait sur une tablette dans la salle de bain d'un logement que j'ai occupé pendant un court laps de temps à Bordeaux. Je n'ai pas pu m'empêcher d'y jeter un oeil et cela plusieurs fois à tel point que je n'ai pas pu quitter La belle endormie sans faire un détour par la librairie Mollat pour m'en procurer un exemplaire bien à moi.  Voici une lecture réjouissante, intelligente, une fenêtre permettant d'aérer l'esprit, un manuel fait de petits moments à savourer sur une longue période de temps, à laisser infuser à l'intérieur de nos propres rêveries quotidiennes, à accepter comme des expériences de pensées, à s'amuser de l'imagination qui a pu les créer et les mettre sur papier. Oui, ce livre est un divertissement, mais qui a dit qu'un divertissement ne pouvait sous-tendre des réflexions sur la vie ou sur le monde, ne pouvait étayer un certain regard philosophique sur tout ce qui nous entoure? À lire sans modération!

Quelques-unes des expériences parmi les 101:

  • Compter jusqu'à mille
  • Courir dans un cimetière
  • Suivre les mouvements des fourmis
  • Manifester seul
  • Considérer l'humanité comme une erreur
  • Immobiliser l'éphémère
______________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Droit

Roger-Pol

Comment marchent les philosophes?

19/08/2020

Droit

Roger-Pol

Dernières nouvelles des choses

07/03/2021