vendredi 28 novembre 2014

L'armée furieuse et Sous les vents de Neptune - Fred Vargas

Avec cette Armée furieuse, je me réconcilie avec Fred Vargas et avec l'univers d'Adamsberg, avec son équipe non traditionnelle et ses méthodes intuitives.

Je me réconcilie parce que, après avoir savouré Pars vite et reviens tard et m'être ainsi initié à ce type de polar d'aujourd'hui qui résonne avec le passé, j'ai eu la curiosité malsaine de voir comment Vargas avait traité du Québec dans Sous les vents de Neptune dont la majorité de l'intrigue s'inscrit dans un Gatineau d'un Québec imaginaire et caricatural. Ce Québec peint par Vargas ne peut être né que d'une auteure qui n'a pas amorcé sa recherche et qui s'est contentée de ce qu'elle croyait savoir sur les lieux, les coutumes, la langue et les us du cadre dans lequel elle voulait situer son polar. La représentation grotesque du Québec et de la façon de parler de ses habitants m'a fait douter et j'ai été, à maintes reprises, tenté de laisser en plan cette lecture. Mais, Il semble que l'intrigue ait été à la hauteur, car elle a fait en sorte que je me rende jusqu'à la dernière page.

L'approche à L'armée furieuse a été, quant à elle, tout autre et dès les premières pages j'ai été plongé dans un monde qui se situe à cheval sur l'histoire, l'histoire réelle de meurtres commis à Ordebec et celle presqu'aussi réelle qui vit dans l'imaginaire des gens de ce village normand.

mercredi 26 novembre 2014

Sur la lecture - Marcel Proust

Il n’y a peut-être pas de jours de notre enfance que nous ayons si pleinement vécus que ceux que nous avons cru laisser sans les vivre, ceux que nous avons passés avec un livre préféré. [M.P.]
Ma première lecture de Marcel Proust. C'est en fait un ouvrage de quelques pages puisqu'il était destiné à constituer la préface de la traduction de Sésame et les Lys de John Ruskin. Il s'agit toutefois d'un texte dont la nature même allait bien au-delà de sa fonction première et dont la forme comme le contenu supposaient une vie littéraire plus longue que le roman qui en  avait été l'initiateur ou le prétexte.

Si je n'avais abordé encore Proust, c'est sûrement signe d'une certaine crainte, d'une certaine gêne devant l'ampleur de l'oeuvre, une importance qui se mesure au nombre de tomes d'À la recherche du temps perdu, à la longueur de ses phrases ou à l'influence que Proust a eue sur la littérature du XXe siècle.

J'ai donc attendu qu'un texte et un corpus plus restreint s'offrent à moi et, le moment propice se présentant, j'ai plongé. Je n'aurai pas regretté et j'ai ainsi pu sentir l'attrait que la plume de Proust peut exercer sur ses lecteurs depuis plus d'un siècle.
Puis la dernière page était lue, le livre était fini. Il fallait arrêter la course éperdue des yeux et de la voix qui suivait sans bruit, s’arrêtant seulement pour reprendre haleine, dans un soupir profond. [...] Alors, quoi ? ce livre, ce n’était que cela ? Ces êtres à qui on avait donné plus de son attention et de sa tendresse qu’aux gens de la vie, n’osant pas toujours avouer à quel point on les aimait, et même quand nos parents nous trouvaient en train de lire et avaient l’air de sourire de notre émotion, fermant le livre, avec une indifférence affectée ou un ennui feint ; ces gens pour qui on avait haleté et sangloté, on ne les verrait plus jamais, on ne saurait plus rien d’eux. [M.P.]

samedi 8 novembre 2014

Maus - Art Spiegelman


J'allai voir mon père à Regi Park. [A.S.]
Art Spiegelman signe ici une oeuvre majeure reconnue comme telle depuis longtemps, mais je ne sais pour quelle raison, elle ne s'était pas glissée dans mes lectures. C'est le hasard des rencontres d'amateurs de bd par personnes interposées qui m'aura remis entre les mains un exemplaire de Maus. Ce récit personnel de la relation de l'auteur avec son père et de l'expérience de celui-ci dans la Pologne sous contrôle nazi qui aura pris des années à mettre en forme n'a été que quelques jours sur ma table de lecture tant j'y revenais intensivement, mais son impact laissera une trace sans équivoque dans la trame de mes contacts avec la bd. Cela me réconcilie également avec la bd américaine que je méconnais malheureusement.

samedi 11 octobre 2014

Petits suicides entre amis - Arto Paasilinna

Les plus redoutables ennemis des Finlandais sont la mélancolie, la tristesse, l'apathie. [A.P.]

Les critiques de Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire faisaient parfois référence à l'auteur finlandais Arto Paasilinna et j'avais déjà croisé ce nom au fil de mes lectures. J'étais intrigué et j'ai voulu assouvir ma curiosité. C'est donc ainsi et un peu par le hasard de la disponibilité du titre que j'ai ouvert Petits suicides entre amis.
On entre ici dans un roman-route (road novel) qui pour un lecteur québécois possède les attraits d'un certain dépaysement, l'essentiel du parcours se déroulant en Finlande. Deux êtres déçus de la vie (un entrepreneur spécialiste de la faillite et un colonel veuf inconsolable) se croisent au moment où ils comptaient mettre fin à leurs jours. Ils échafaudent un projet qui deviendra le coeur de ce périple. Ils mettent en place un groupe d'entraide constitué de suicidaires potentiels qui amorceront une démarche itinérante vers le lieu idéal pour un suicide collectif.
SONGEZ-VOUS AU SUICIDE ? Pas de panique, vous n'êtes pas seul. Nous sommes plusieurs à partager les mêmes idées, et même un début d'expérience. Écrivez-nous en exposant brièvement votre situation, peut-être pourrons-nous vous aider. Joignez vos nom et adresse, nous vous contacterons. Toutes les informations recueillies seront considérées comme strictement confidentielles et ne seront communiquées à aucun tiers. Pas sérieux s'abstenir. Veuillez adresser vos réponses Poste restante, Bureau central de Helsinki, nom de code " Essayons ensemble ". [A.P.]
C'est ainsi que cet équipage inhabituel parcourra la Finlande et l'Europe dans un car flamboyant pour une quête inavouable, un voyage qui sera tout sauf tragique. On l'accompagne du Cap Nord à Sagres au Portugal et ce n'est pas dans la tristesse. 
Ne cherchons pas ici le roman profond qui fait réfléchir sur la vie, le monde, la société, mais plutôt un roman-route qui nous extrait de notre quotidien le temps de faire plusieurs sourires bien sentis.

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Sur Rives et dérives, on trouve aussi :


Paasilinna
Arto
Le lièvre de Vatanen 

dimanche 31 août 2014

Monsieur Ho - Max Férandon

Le jour entrait dans une nuit à court d'arguments. [M.F.]
Est-ce un roman, une fable, un conte? Tenter de classifier Monsieur Ho n'est pas chose facile. Est-ce qu'on peut dire qu'il s'agit d'un roman de voyage, du parcours initiatique d'un recenseur dans un "pays pluriel", de la traversée exploratoire de soi-même vers ses racines inavouées, d'un conte à tiroirs ou d'une fable sur l'identité dans un monde où elle ne trouve plus sa place? Chaque lecteur y verra une part de soi et s'en dressera une scénographie propre, la classification est-elle ici nécessaire?
Monsieur Ho est irrésistible par sa façon si chinoise de présenter ce périple dans l'empire du milieu, par son regard sur les gens qui le peuple, par sa description si réservée de leurs coutumes.
On ne sait comment classifier Monsieur Ho sinon dans la catégorie des lectures que j'ai apprécié.
Lui, le citadin aux ourlets tombants et aux chaussures soyeuses, le démographe sismographe, l'embrasseur de pluriel et de solitude, examinait pour la première fois de sa vie une réelle possibilité de quitter la planète et de rester sur sa Lune. [M.F.]