vendredi 3 octobre 2025

Passage - Karel Pecka

Un gratte-pieds d’acier, encastré dans le dallage au niveau de la sortie, interrompait la mosaïque régulière du carrelage gris-blanc et rouge. [K.P.]

Après un court séjour à Prague, je suis revenu enthousiasmé par les passages et les galeries, qui témoignent d’un héritage architectural remarquable du début du 20e siècle. Ces palais sont le théâtre d’une vie animée et éclectique grâce à une offre commerciale et culturelle dynamique. Je n’ai pas pu résister à l’envie de lire ce roman tchèque où un labyrinthique passage constitue l'unique décor. Je n'ai pas été déçu. L'auteur, Karel Pecka, met en scène un sociologue, Antonin Tvrz, qui se perd à la fois dans sa vie et dans le passage. Il constate que le temps n'a pas, dans ce passage, la valeur qu'il peut avoir dans la société extérieure marquée par les responsabilités, les contraintes du quotidien et les manifestations du parti des «Purs». Le passage est en soi un univers insolite, mais il y trouve une liberté qu'aucune expérience précédente n'a pu lui procurer. Antonin Tvrz, le sociologue, semble mener une expérience de recherche-action participative, plongeant profondément dans son milieu d'étude jusqu'à ce que le monde extérieur déferle brutalement dans le passage et signale avec violence sa présence.  

Écrit en 1974, Passage porte la trace de la société dans laquelle il a été créé, avec les doutes, les questionnements et l'impasse de sa gouvernance. 

Par un concours de circonstances j’ai passé tout l’après-midi d’aujourd’hui dans le passage et ce que j’y ai vécu m’a surpris. J’ai rencontré un homme qui échange des appartements, un retraité qui revend des billets de cinéma, j’ai vu une vieille qui récupère les restes du self. J’ai comme le sentiment que ce sont là des fragments isolés d’un ensemble, d’une réalité qu’il ne m’est pas donné de comprendre, que derrière leurs occupations apparentes il existe d’autres plans. Je sais que cela paraît un peu fou, mais je ne peux pas me défaire de cette impression. Ça ne te paraît pas bizarre ?  [K.P.]

Tout ne prouve-t-il pas qu’il s’agit présentement de la disparition définitive de cette civilisation bâtie sur des cycles d’éphémères et qu’il ne reste d’autre solution que de trouver sa propre voie dans le noir, sans tenir compte des événements extérieurs ? [K.P.] 


Aucun commentaire: