vendredi 6 mai 2016

Chroniques birmanes - Guy Delisle

Après Shenzhen en Chine et Pyongyang en Corée, Guy Delisle publie Chroniques birmanes. Guy Delisle et sa conjointe, administratrice pour Médecins sans frontières, sont logés à Rangoun (Yangon), la capitale de la Birmanie (Myanmar) jusqu'à ce que la junte militaire décide de la déplacer dans le centre du pays en 2007. Ses chroniques sont celles d'un étranger dans un monde sous l'emprise d'une dictature qui rend complexe chaque geste du quotidien. Il habite à deux pas de la détention en résidence de «la dame», Aung San Suu Kii, mais jamais il ne pourra s'en approcher. Chroniques birmanes n'est pas la critique politique d'un régime particulier, mais plutôt la description parfois en autodérision du quotidien d'un occidental dans ce milieu difficile à saisir. La narration ne fait toutefois pas abstraction du contexte et Delisle nous fait partager ses expériences d'acculturation.

Dans cette série, Chroniques de Jérusalem demeure, selon moi, au sommet de l'art de Delisle.

Voici des extraits de Chroniques birmanes : ici et ici
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Sur Rives et dérives, de Guy Delisle, on trouve des commentaires à propos de :

Delisle

Guy

Chroniques de Jérusalem 

24/12/2014

Delisle

Guy

Chroniques de jeunesse

29/12/2021

Delisle

Guy

Shenzhen 

31/03/2015

mardi 3 mai 2016

Goodbye, Columbus - Philip Roth

[Archives Juillet 2006]

La première fois que je vis Brenda, elle me demanda de tenir ses lunettes. [P.R.]

C'est sur la recommandation d'une collègue de travail que j'ai abordé cet auteur américain. Il faut convenir que j'ai peu lu les écrivains américains, si ce n'est Kerouac. Ma collègue faisait valoir un lien entre Philip Roth et Jean-Paul Dubois dans leurs descriptions respectives de la vie ordinaire. Goodbye, Columbus est parmi les premiers ouvrages de Roth. Peut-être cela explique-t-il que je n'ai pas trouvé le lien si évident. On trouve ici six nouvelles qui n'ont de commun avec le genre que la longueur. En effet, il s'agit plutôt de courtes histoires qui ne possèdent pas les caractéristiques propres à la nouvelle. Cela n'en fait pas des histoires moins intéressantes. Elles ont comme coeur le monde juif américain et son contact avec le monde goy ou le monde des Gentils.

vendredi 29 avril 2016

Le Musée des introuvables - Fabien Ménar

[Archives Décembre 2005]

Il n'est pas rare que l'on surprenne Édouard Masson dressé derrière la baie vitrée, là-haut, dans son bureau en surplomb, en train de contempler la vie qui s'agite sous ses yeux. [F.M.]
Quelquefois, on découvre un livre par la simple lecture de sa jaquette arrière dans un étalage chez le libraire. Ce fut le cas. Pourtant, il n'arborait pas l'étiquette «Coup de coeur» chère à certains et même à Édouard Masson. Quelques mots sur la parution d'un livre mystère édité simultanément chez plusieurs éditeurs ont suffi. À la lecture, on découvre un lieutenant de police qui utilise le subjonctif autant sinon plus que la déduction, un lieutenant qui impose des lectures et des rapports de ces lectures à ses hommes. On rencontrera également un illuminé, un prof raté, une étudiante sans gène, et quelques manuscrits seront évoqués.

Une belle lecture.

mardi 26 avril 2016

Villa des hommes - Denis Guedj

[Archives Juin 2008]

Frac noir et haut-de-forme cabossé, Ernest tenait les rênes avec la maîtrise des vieux cochers qu'aucune rosse n'avait pris au dépourvu. [D.G.]
C'est la rencontre de deux hommes dans un univers clos, celui d'un hôpital psychiatrique en Allemagne en 1917. L'un de ces hommes est un clone de Georg Cantor (mathématicien décédé en 1918, il avait notamment travaillé sur la théorie des ensembles, les ensembles infinis et les nombres transfinis). Guedj, pour se garder la distance voulue pour rédiger un roman, n'a pas mis Cantor en scène, mais son double. La rencontre du mathématicien avec un anarchiste français, soldat par surcroît, n'a peut-être eu lieu que dans l'imagination de l'auteur, mais elle est la source d'une discussion qui prend place lentement dans le roman. Lentement, donc, s'amorcent les préludes d'une histoire de la découverte, ou serait-ce l'invention, des transfinis. Parallèlement, on verra ce qui tourmente ces deux hommes qui, finalement, ont peut-être plus en commun qu'ils ne le croyaient.

Guedj atteint ici un niveau d'écriture intéressant qui se dégage suffisamment de l'histoire pour être attrayant.
L'essence des mathématiques, c'est la liberté. [Georg Cantor]
Il ne faut pas qu'on nous chasse du paradis que Cantor a créé pour nous. [David Hilbert]

mardi 12 avril 2016

La septième fonction du langage - Laurent Binet


La vie n'est pas un roman. [L.B.]
La vie n'est peut-être pas un roman, mais Laurent Binet jouera systématiquement sur la fine frontière qui les sépare. On verra défiler l'ensemble de l'intelligentsia française des années quatre-vingt dans une histoire réaménagée et réinventée autour d'un fait réel, celui-là, l'accident qui fera perdre la vie à Roland Barthes. En effet, le 25 février 1980, le sémiologue et critique Roland Barthes est renversé par la camionnette d'une blanchisserie, il en mourra le jour suivant. Et si ce n'était pas un accident? Qui aurait voulu tuer Roland Barthes? Pourquoi? Une enquête s'amorce. C'est le commissaire Bayard, un homme d'une droite assumée, qui mènera l'investigation. Avec comme adjoint conscrit, un jeune enseignant de linguistique, il s'engagera dans le monde obscur de la sémiologie et de la linguistique théorique. Le mobile serait-il cette mystérieuse septième fonction du langage, une fonction magique qui s'ajouterait aux six fonctions établies par Jakobson dans son schéma de la communication verbale? Plusieurs ont à ce sujet une opinion éclairée. On sera ainsi confronté à des acteurs importants d'alors et d'aujourd'hui : Louis Althusser, Michel Foucault, Philippe Sollers et Julia Kristeva, Jacques Derrida, Bernard-Henri Lévy, Umberto Eco et d'autres. Ils seront mêlés de près ou de moins près à cette rocambolesque enquête policière qui prend des allures politiques dans la campagne présidentielle qui se déroule alors et qui mènera François Mitterrand à la présidence. Cette aventure policière est intelligente et drôle, elle a un pied dans une certaine réalité et l'autre dans une reconstitution extravagante d'un réel qui frise l'indicible.