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dimanche 25 juillet 2021

Sur le bout de la langue - Bertrand Périer

Les mots sont mes plus chers compagnons. [B.P.]
Voici un petit ouvrage a priori délicieux. Un amateur et amoureux des mots nous offre un parcours du vocabulaire associé à divers domaines. L'auteur, lui-même avocat, a avec le mot juste une relation qui dépasse bien celle qu'il aurait pu développer en raison de son travail. S'il aborde le champ juridique, bien sûr, il se permet des incursions dans le lexique associé à plein d'autres univers, que ce soit celui de la politique, celui des religions, de la nourriture, ou encore de la musique. J'y ai trouvé quelques perles, l'ensemble m'a assurément amusé, mais il demeure que j'en suis sorti un peu déçu. Peut-être y avais-je placé trop d'espoir ?
Enfant, dictionnaires et encyclopédies m’ont accompagné. Je les feuilletais avec gourmandise et passion, ils étaient des fenêtres ouvertes sur la science, l’art, l’histoire, les civilisations anciennes ou éloignées, la nature, la géographie.  [B.P.]
Je suis mélomane. Il y a quelque chose d’un peu étrange dans ce mot. Y aurait-il inévitablement dans l’amour de la musique une forme de « manie », d’excès, d’obsession, de démesure, de vice, de folie ? Serait-on mélomane comme on est mégalomane, mythomane, graphomane ou cocaïnomane ? Ne pourrait-on aimer la musique raisonnablement, la « consommer avec modération », selon les objurgations contemporaines des sociétés aux plaisirs tièdes ? L’amour de la musique est le seul que l’on désigne par un terme qui exclut la demi-mesure : on est bibliophile, on est cinéphile, on est francophile, mais on est mélomane ! [B.P.] 

 

vendredi 9 juillet 2021

Sapiens, a graphic History, The Birth of humankind - Y.N.harari, D.Vandermeulen, D.Casanave

About 14 billion years ago, matter, energy, time and space came into being in what is known as the Big Bang. The story of these fundamental features of our universe is called physics. [Y.N.H]

J'avais lu l'essai Sapiens, une brève histoire de l'humanité et ce parcours macroscopique de l'histoire du genre humain m'avait beaucoup plu. J'y avais reconnu le talent de vulgarisateur de Harari. Cette aptitude, il la met ici, encore une fois et de merveilleuse façon, à contribution en s'alliant avec des habitués du médium de la bande dessinée pour nous offrir une joyeuse adaptation en roman graphique de son oeuvre maîtresse. On ne peut que conclure que le mandat a été respecté. Ce n'est pas une simple transcription en BD, c'est plutôt une nouvelle mise en scène autour d'une partie du contenu de l'essai qui porte le même nom. Yuval Noah Harari devient lui-même un personnage de l'aventure. Il s'agit là d'un artifice intéressant. Cette quête à propos de l'histoire de l'humanité, des origines jusqu'au procès de cet homo sapiens nomade qui a semé la mort lors de ses déplacements, nous transporte des premières pages jusqu'à la toute fin de ce premier volet.

Je demeure en attente de la suite.

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Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Harari

Yuval Noah

Homo Deus, une brève histoire de l’avenir

29/05/2019

Harari

Yuval Noah

Sapiens, une brève histoire de l’humanité 

05/08/2016



vendredi 2 juillet 2021

Le rêve de Champlain - David Hackett Fischer


Notre point de départ est une gravure française du début du XVIIe siècle. C'est une scène de bataille comme on en trouverait chez tout bon marchand de dessins anciens en Europe.
[D.H.F.]

Je ne connaissais pas tant l'histoire de Samuel de Champlain. Il me restait quelques traces de mes cours d'histoire du Canada, quelques lectures au hasard des commémorations historiques, mais sans plus. Je me suis donc lancé tout à fait ouvert dans cette somme consacrée à l'homme multiple qu'était Champlain, le soldat, le navigateur, le cartographe, l'ethnologue et même l'humaniste, selon l'auteur. On ne peut que louer le travail immense qu'a pu constituer l'écriture de cet ouvrage. David Hackett Fischer relate parfois avec un minutieux détail qui laisse songeur sur la place qu'a pu prendre l'invention ou tout du moins l'extrapolation historique. Mais, au-delà de cette inquiétude, Le rêve de Champlain demeure une lecture prenante et enrichissante même si elle a tendance à s'apparenter à une hagiographie. On y voit comment Champlain dans ses efforts de développement d'une société en terres d'Amérique a pu agir d'une façon différente que celle utilisée par les conquérants espagnols au sud du continent. La thèse que Fisher défend avance que Champlain a voulu construire une société où colons et Indiens auraient pu vivre en paix dans un équilibre où chacun apprenait de l'autre. Il demeure difficile de juger avec l'oeil d'aujourd'hui les agissements d'intervenants du XVIIe siècle. Le rapprochement que Champlain souhaite avec les peuples indiens est-il mu par l'humanisme ou par la stratégie militaire ? Quoiqu'il en soit, le regard que porte Fisher sur le parcours de Champlain demeure essentiel et je ne peux que remercier l'ami qui m'en a suggéré la lecture.

De 1599 à 1633, il traversa l’Atlantique au moins vingt-sept fois et fit des centaines d’autres voyages sans jamais perdre un navire. [D.H.F]

Après les délires de la rectitude politique, la haine idéologique, le multiculturalisme, le postmodernisme, le relativisme historique et les manifestations les plus extrêmes du cynisme universitaire, les historiens aujourd’hui redécouvrent les fondements de leur discipline avec une foi nouvelle dans les possibilités du savoir historique, et ce, avec des résultats surprenants. [D.H.F]

Samuel de Champlain sut maintenir des relations étroites avec de nombreuses nations indiennes tandis qu’il fondait des colonies européennes permanentes dans le Nouveau Monde. Il vécut parmi les Indiens et passa une bonne partie de son temps avec eux, tout en contribuant à l’essor de trois populations et cultures francophones : les Québécois, les Acadiens et les Métis. [D.H.F]

 

mercredi 23 juin 2021

Les 101 mots de la pataphysique - Collège de 'Pataphysique

Le présent ouvrage a été rédigé sous la surveillance de la Sous-Commission du Grand
extérieur, par Paul Gayot et Thieri Foulc.
[C.P.]
Quel plaisir de retrouver l'univers de Jarry, du docteur Faustroll et de la 'Pataphysique, cette « science des solutions imaginaires qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité », quelle joie de parcourir ces magnifiques expressions de l'absurdité, ces rituels amalgamés d'extravagance, de bouffonnerie et de titres à rallonge issus de l'humour potache. En quelques entrées de ce dictionnaire hors-norme, j'étais projeté dans mon adolescence au moment où je découvrais, éberlué, le monde du père Ubu, de sa suite et des diverses réincarnations dont il a pu faire l'objet.   

Du calendrier pataphysique au grand singe papion Bosse-de-nage (lequel ne savait de parole humaine que «Ha Ha»), du maître des phynances à la chandelle verte, je me suis laissé entraîner par la suggestion dans cette folie littéraire, dans ce délire créatif et je n'ai pas boudé mon plaisir. Longue vie au Collège, longue vie à sa sous-commission qu'est l'Ouvroir de littérature potentielle, longue vie à la 'Pataphysique et merdre.
L'idée de « vérité » est la plus imaginaire de toutes les solutions. [C.P.]
«En clinamen, garde ta laine ; en palotin, fais comme il te vient». [C.P.]
La 'Pataphysique n'est pas un humanisme. [C.P.]
Les uns croient qu'on ne meurt pas. C'est évidemment trop naïf. Les autres croient que mourir n'est rien vu qu'avant on vit et qu'après on n'y pense plus. C'est - non moins évidemment - trop bien raisonné [...] la mort est ironique. [C.P.]
La Potentialité [...] est une « gerbe de solutions imaginaires » et elle est potentiellement présente dans la définition de la Pataphysique par Alfred Jarry, pour qui celle-ci « accorde aux linéaments les propriétés des objets décrits par leurs virtualités ». [C.P.]
Le Collège de 'Pataphysique se définit comme « une société de recherches savantes et inutiles ». Il a entrepris des campagnes pour se faire « reconnaître d'inutilité publique ». [C.P.] 

vendredi 11 juin 2021

Cahiers Georges Perec, no 13, La Disparition, 1969-2019 : un demi-siècle de lectures - dir. Maxime Decout


La Disparition doit sa notoriété au défi qu'il relève : écrire plus de trois cents pages sans utiliser la lettre la plus fréquente de l'alphabet, le e. S'il est indéniable d'y voir un exploit formel, le roman ne peut cependant y être réduit. [M.D. et Y.M.]

Se replonger dans une lecture signifiante par le truchement et l'interprétation d'autres lecteurs, c'est ce que m'a fait vivre cet agréable moment où j'étais totalement absorbé par les regards portés sur les méandres de l'œuvre lipogrammatique par excellence que représente La Disparition de Georges Perec. J'ai revécu cette expérience étonnante de lire page après page un texte sans e qui nous transporte et nous enivre d'un contexte policier entrant manifestement en résonance avec la forte contrainte choisie. Ce numéro des Cahiers Georges Perec s'ouvre sur 50 souvenirs de La Disparition, la mémoire d'actuels oulipiens à propos de leurs contacts respectifs avec l'œuvre en question. 

Je me souviens que chaque traduction de La Disparition a été une aventure et chacun de ses traducteurs une sorte de héros. [Eduardo Berti]

Je me souviens avoir pensé, en lisant La Disparition pour la première fois, que ce n'était pas si compliqué, puis d'avoir essayé de « faire pareil » et commencé par constater qu'on ne pouvait écrire ni « faire », ni « pareil ». [Hervé Le Tellier] 

J'aurai appris au travers les textes suivants à quel point Perec avait joué de la réécriture intertextuelle pour construire son tour de force. Comment il avait réécrit en langage lipogrammatique de larges passages de Raymond Roussel, un oulipien par anticipation, comment il avait emprunté des phrases réaménagées d'Arthur Gordon Pym d'Edgar Allan Poe, comment il pastiche de nombreux auteurs comme Borges, Baudelaire, Rimbaud ou Victor Hugo.

Certaines thèses avancent sur un terrain moins stable en accordant à la contrainte utilisée une signification politique sinon psychanalytique en évoquant les questions existentielles qui traversent l'œuvre de Perec. Ce n'est pas l'aspect qui m'aura le plus séduit. 

Je demeure avec l'idée que La Disparition mérite le plus d'angles d'approche que possible, qu'il y a plus que l'exercice de style dans ce roman, que l'intertextualité manifeste engage vers une nouvelle lecture, que Perec ne cessera de me surprendre et de m'éblouir, et enfin, que la littérature serait bien différente sans ses écrits.   

[...] sortir du parcours rassurant du mot trop subit, trop confiant, trop commun, n'offrir au signifiant qu'un goulot, qu'un boyau, qu'un chas, si aminci, si fin, si aigu qu'on y voit aussitôt sa justification. [G.P.]

Il y avait un manquant. Il y avait un oubli, un blanc, un trou qu’aucun n’avait vu, n’avait su, n’avait pu, n’avait voulu voir. [G.P.]

Pour Georges Perec, l’écriture est bien le lieu où se rencontrent la lecture, les souvenirs et l’imaginaire, ces trois concepts se retrouvant toujours entremêlés dans chacun de ses écrits, la contrainte permettant au texte de naître. [Éric Lavallade, Le roman (policier) dans le roman, dans Cahiers Georges Perec 13] 

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Autour de Georges Perec, sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Burgelin

Claude

Album Georges Perec

20/04/2022

Évrard

Franck

Georges Perec ou la littérature au singulier pluriel 

06/01/2015

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Cantatrix Sopranica L. et autres écrits scientifiques 

30/05/2010

Perec

Georges

Espèces d’espaces

05/06/2017

Perec

Georges

Georges Perec

16/02/2010

Perec

Georges

L’art et la manière d’aborder son chef de service pour lui demander une augmentation

15/03/2009

Perec

Georges

L’attentat de Sarajevo

05/09/2016

Perec

Georges

La vie mode d’emploi 

10/02/2016

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Georges

Le Voyage d’hiver et ses suites

22/08/2019

Perec

Georges

Penser / classer 

30/05/2016

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Georges

Tentative d’épuisement d’un lieu parisien

09/07/2018

Perec

Georges

Un cabinet d’amateur, Histoire d’un tableau

13/06/2020

Perec

Georges

Un homme qui dort

02/10/2016





dimanche 30 mai 2021

Tintin et le trésor de la philosophie - Philosophie magazine (Sven Ortoli, rédacteur en chef)

Tintin parcourt le monde au gré de ses aventures, mais il sillonne aussi les territoires de la philosophie.
Encore un magazine autour du thème Tintin, je ne me lasse pas et cela ne risque pas d'arriver de sitôt. Il y a dans les aventures de ce reporter qui n'écrit pas d'articles et dont on ne connait pas le journal, une richesse incontestable qui rapproche ces histoires partagées par la culture populaire de la mythologie des Anciens. Cela devient une référence à laquelle on se mesure, par laquelle on se construit ; on grandit à la lecture de Tintin et de son monde. Dans le cas de ce hors-série, Tintin et les divers personnages qui peuplent ses aventures deviennent un support pour aborder de grandes thématiques telle la métaphysique de la raison, la superstition ou la magie. Quelques cases suffisent pour placer le sujet et le croiser au discours des philosophes. On abordera ainsi des thèmes relevant de l'éthique (le devoir, le courage, l'amitié, le respect ...). Le philosophe Jean-Luc Marion affirme d'ailleurs à cet égard que « [...] Tintin lui-même se réduit, en quelque sorte, à une épure. » Il représente l'éthique, l'universel. Enfin, ce voyage philosophique dans l'œuvre d'Hergé nous entraîne du côté de la politique pour jeter un regard sur les idées de justice, d'État, de propriété, de liberté et de pouvoir. On ne détourne pas Les aventures de Tintin en les plaçant au centre de ces concepts philosophiques, on en extrait des lectures parallèles, on en fait un archétype, ce qu'ils sont déjà pour appartenir à l'inconscient collectif.

 

vendredi 21 mai 2021

Pourquoi le Nord est-il en haut? Petite histoire des conventions cartographiques. - Mick Ashworth

Dans La Chasse au Snark, un poème de Lewis Carroll publié en 1876, l’équipage d’un navire se montrait ravi de bénéficier d’une carte pour sa traversée, qui s’annonçait périlleuse. [M.A.]

J’ai abordé cet essai, curieux et avide de connaître quelques-unes des entrailles des cartes si présentes dans l’histoire comme dans le présent. J’y ai trouvé encore plus que je ne l’espérais, une richesse insoupçonnée de questionnements, de problèmes à résoudre, de choix à effectuer, d’interrogations sur la représentation, de réflexions sur la nécessaire limpidité de la communication. Tout cela pour établir d’inévitables conventions supportant les cartes qui nous guident, qui nous conduisent, qui nous informent, qui nous pilotent, qui nous inspirent. J’ai de tout temps aimé lire des cartes, qu’elles appartiennent à un atlas ou à un essai historique, qu’elles se présentent en papier ou virtuelles sur un écran, qu’elles permettent de trouver mon chemin on qu’elles fassent naître un rêve. Les illustrations de cet ouvrage ont magnifiquement contribué à ce périple dans le monde de la cartographie.

Ce ne fut qu’au XIXe siècle que l’on accepta dans le monde entier de respecter la convention voulant que le nord se trouve au sommet des cartes. [M.A.]

Dans le même temps où j’étais happé dans ce monde de représentation géographique, je lisais Les bases secrètes de David Turgeon et une improbable intertextualité se présenta.

Il est remarquable, constate Irénée, que la carte parvienne, sur une superficie comparativement limitée à suggérer toute la complexité du monde représenté; un état de l’univers dépourvu de sens, de finalité, mais pourtant riche de formes et de potentiel; un espace de narration infini au sein duquel toutes les routes se valent. La cartographie, conclut-il avec joie dans le soir qui s’installe, ouvre à un monde plus vaste que le monde lui-même. [D.T.]

 

dimanche 9 mai 2021

Comment parler des faits qui ne se sont pas produits - Pierre Bayard

Parmi tous les récits de la Seconde Guerre mondiale qui sont parvenus jusqu'à nous et nous la font revivre, l'un des plus émouvants est indiscutablement l'ouvrage de Misha Defonseca, Survivre avec les loups - adapté au cinéma par Véra Belmont -, où elle raconte comment, petite fille abandonnée des siens, elle a traversé une partie de l'Europe à la recherche de sa famille. [P.B.]

Pierre Bayard poursuit son exploration hors norme de la littérature. Cette fois, il aborde la véracité des faits racontés au travers des récits, des romans, des biographies, des journaux personnels. On est alors confronté à l'histoire d'événements qui ne se sont jamais réalisés, sinon dans l'imagination de l'auteur, sinon dans la reconstruction qu'en fait le lecteur. Cela peut être déstabilisant, mais Bayard, jamais à court de prises de position paradoxales, nous démontre toute la richesse de ces faits alternatifs. Face aux fabulateurs, Bayard critique celles et ceux, les chicaneurs, qui ne cessent de vérifier tous les faits rapportés, qui, de manière parfois trop scrupuleuse, inspectent les textes à la recherche d'erreurs, de mythes, de chimères. Mais, l'invention dans les récits est porteuse d'enseignements et, plus d'une fois, c'est sur la base d'histoires en partie fausses que se sont construits certaines théories ou, même, certains pans du savoir. Pierre Bayard parle de la fécondité du faux et prône même un droit à la fabulation pour faire valoir la fiction hors de son habitat naturel.  

[...] une pulsion narrative nous aide à supporter notre mobilité psychique en y injectant, comme le fait au réveil le récit manifeste du rêve, de la cohérence et du sens. Ce besoin impératif de raconter - qu'il s'applique à la journée passée ou aux années écoulées - est un ressort majeur de notre fonctionnement psychique, qui a le mérite de nous protéger de l'éparpillement. [P.B.]

Sur le plan politique comme sur le plan scientifique, il apparaît clairement que des exemples largement remaniés pour la circonstance, voire forgés de toutes pièces, peuvent permettre d'inventer des mondes donnant à rêver ou de dégager des lois générales que les cas réels, moins révélateurs, auraient été inaptes à appuyer. [P.B.]

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Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Bayard

Pierre

Comment parler des lieux où l’on n’a pas été?

05/02/2020

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Comment parler des livres que l’on n’a pas lus?

13/06/2009

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Et si les œuvres changeaient d’auteur?

07/10/2019

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Il existe d’autres mondes

20/07/2017

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Le hors-sujet : Proust et la digression

07/09/2022

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Le plagiat par anticipation

08/11/2023

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Le titanic fera naufrage

26/09/2020


 

mercredi 5 mai 2021

La littérature, pour quoi faire ? - Antoine Compagnon

Pourquoi et comment parler de la littérature française moderne et contemporaine au XXIe siècle? [A.C.]
Il s'agit d'un très court texte de Compagnon, en fait, c'est sa leçon inaugurale prononcée en 2006 comme titulaire de la chaire Littérature française, moderne et contemporaine :  histoire, critique, théorie au Collège de France. Un court texte, mais une idée claire et porteuse sur la littérature et son rôle dans notre propre construction comme être pensant, comme vivant, comme humain. J'aurais mis en exergue une foule d'extraits de cet opuscule.

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Mais [...] j'ai toujours enseigné ce que je ne savais pas et pris prétexte des cours que je donnais pour lire ce que je n'avais pas encore lu, et apprendre enfin ce que j'ignorais. [A.C.]
Un essai de Montaigne, une tragédie de Racine, un poème de Baudelaire, le roman de Proust nous en apprennent plus sur la vie que de longs traités savants. [A.C.]
La littérature déconcerte, dérange, déroute, dépayse plus que les discours philosophique, sociologique ou psychologique, parce qu'elle fait appel aux émotions et à l'empathie. Ainsi parcourt-elle des régions de l'expérience que les autres discours négligent, mais que la fiction reconnaît dans leur détail. [A.C.]
La lecture [est] une expérimentation des possibles. [A.C.]
[La littérature] est La Vie mode d'emploi, suivant le titre impeccable de Georges Perec. [A.C.]

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Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Compagnon

Antoine

Un été avec Montaigne 

27/01/2014

 

mardi 13 avril 2021

Le chasseur d'histoires - Eduardo Galeano

Le vent efface les traces des mouettes. Les pluies effacent les traces de pas des hommes. Le soleil efface les traces du temps. [E.G.]
Il est difficile de décrire cet objet livre, car il ne répond à aucun classement. À moins qu'on ne le catégorise comme un recueil de poèmes, la catégorie poésie étant, selon moi, moins empreinte de normes, plus libre et plus ouverte à l'expérimentation. Voici donc un opuscule regroupant des pensées, des avis sur de petites tranches d'histoires, une mosaïque de regards sur le monde, des opinions politiques, sociales, un ensemble de récits, d’anecdotes, de légendes où mémoire, morale et sens de la vie s’inscrivent dans de courts textes souvent sud-américains, mais pas uniquement. On peut l'ouvrir sur n'importe quelle page pour entrebâiller une nouvelle fenêtre et recevoir un vent frais chargé d'idées.

C'était ma première lecture de cet auteur uruguayen. J'ai hâte de me replonger dans son univers multiple et d'en découvrir d'autres aspects.

L'entraide et la conscience communautaire ne sont peut-être pas des inventions humaines. Les coopératives de logements, par exemple, ont peut-être été inspirées par les oiseaux. [E.G.]

À Kashi, ville saine des Tamouls de l'Inde, vivait et jouait le flûtiste qui jouait le plus faux au monde. On le payait très bien, pour qu'il joue très mal. Au service des dieux, sa flûte torturait les démons. [E.G.]

Un jour de l'an 1911, La Joconde disparut du Musée du Louvre. Quand la disparue reparut, après deux ans de recherches, on constata que le vol n'avait pas effacé le sourire le plus mystérieux du monde : il avait multiplié son prestige. [E.G.] 

Pour vaincre sa peur, un des enfants, le plus savant, expliqua ce qu'était la mer : - C'est une rivière avec une seule rive. [E.G.] 

Appréciation : 4,5/5 

dimanche 7 mars 2021

Dernières nouvelles des choses - Roger-Pol Droit

Il s'avance vers moi, tend la main. Il dit : «Alors, comment vont les choses?» [R.-P. D.]

Roger-Pol Droit, pour le projet de cet ouvrage, s'est astreint à un exercice particulier, celui de porter sur les choses ordinaires de son environnement un regard philosophique et métaphorique. Il s'insère dans cet univers des objets inanimés pour tenter de les approcher, les épier, tel un explorateur en constituant un journal de bord de ses observations. Du trombone à la théière en passant par le lave-linge autant que le répondeur, Roger-Pol Droit, à travers son expérimentation tous azimuts des réalités concrètes, dévoile un peu de lui-même en exposant, sans embarras, son rapport aux choses dont il donne des nouvelles. Il y a dans cette expédition quelque chose qui relève de l'infra-ordinaire comme l'appelait si bien Perec qui a ouvert la recherche et l'analyse de « ce qui se passe chaque jour et qui revient chaque jour, le banal, le quotidien, l'évident, le commun, l'ordinaire, l'infra-ordinaire, le bruit de fond, l'habituel... » [Georges Perec, L'infra-ordinaire, 1989]. Dernières nouvelles des choses s'apparente, dans l'esprit de la démarche comme dans le type d'interrogations ou le ton personnel de la posture, aux 101 expériences de philosophie quotidienne qui m'avait déjà séduit. 

Dans un premier temps, l'auteur tente une classification des choses :

Je me pose sur le banc à la sortie du village, essayant de discipliner des hordes de choses innombrables et diverses qui s’agitent dans ma tête. Choses liquides, choses solides. Choses proches du corps, en contact avec la peau de manière durable (vêtements, sous-vêtements) ou temporaire (savons, serviettes-éponges, mouchoirs) et choses éloignées du corps. Choses tactiles et choses à regarder. Choses à faire marcher et choses inertes. Classements par taille, par poids, par couleur, par provenance, par matière, choses simples et choses composées, choses naturelles et artificielles, artisanales et industrielles, durables ou éphémères, lumineuses ou obscures, choses avec ou sans bouton, uniques ou non... Aucun classement ne tient. À peine évoqué, il se disloque. [R.-P. D.]

Je n'ai pas pu m'empêcher de me remémorer, à cet égard, une citation de Jorge Luis Borges rapportée, je crois, par Alberto Manguel : « Les animaux sont classés comme suit : (a) ceux qui appartiennent à l’Empereur; (b) ceux qui sont embaumés; (c) ceux qui sont dressés; (d) les cochons de lait; (e) les sirènes; (f) les animaux fabuleux; (g) les chiens errants; (h) les animaux inclus dans cette classification; (i) ceux qui tremblent comme s’ils étaient fous; (j) les animaux indénombrables; (k) ceux qu’on dessine avec un pinceau très fin en poil de chameau; (l) et cetera; (m) ceux qui viennent de casser le vase de fleurs; (n) ceux qui, vus de loin, ressemblent à des mouches. »

J'ai adoré ce voyage bien personnel que nous a offert Roger-Pol Droit et je me demande bien comment je pourrais entreprendre de répondre à sa requête de poursuivre l'expérience avec mes propres choses et les pensées qu'elles suscitent en moi. 

[...] ni héroïque ni téméraire, mais fidèle et sérieux, le trombone est une figure de l’éthique. [R.-P. D.]

Les choses destinées à la musique forment une tribu à part. Leur relation au corps est tout à fait singulière. Elles lui dictent leur loi, en même temps, elles attendent tout de lui. La flûte exige une exacte position du tronc, des bras, des doigts, un placement précis des lèvres et du souffle. Quelques millimètres d'écart, tout change. [R.-P. D.]

Imaginez, pendant quelques secondes, qu’un virus encore inconcevable atteigne demain toutes les tables du monde et les fasse disparaître. [R.-P. D.]
Appréciation : 4/5
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Sur Rives et dérives, on trouve aussi ;

Droit

Roger-Pol

Comment marchent les philosophes?

19/08/2020

Droit

Roger-Pol

101 expériences de philosophie quotidienne

29/04/2019