Pourriez-vous m’arrêter ici, s’il vous plaît ?
— Bien sûr, Monsieur. Mais nous ne sommes pas encore sur Elsworthy Road.
— Je souhaiterais continuer à pied. J’ai besoin de marcher. [C.B.]
Clémence Boulouque est écrivaine, journaliste et critique littéraire. Je ne la connaissais pas avant d'aborder ce roman historique qui, dans la forme et l'argument, représente un défi tout à fait remarquable. L'auteure a fait appel à une somme impressionnante de documents, d'archives, d'échanges épistolaires pour créer tout l'univers des discussions qui surviennent dans une rencontre qui fait intervenir Stefan Zweig, Salvador Dali, Gala et Edward James lors d'une visite à la résidence de Sigmund Freud et de sa fille Anna à Londres. Bien qu'on sache que des liens existaient entre ces personnages historiques et hors norme, il n'est pas établi qu'un tel entretien ait eu lieu à Londres en 1938. Mais, peu importe, voilà l'occasion pour des échanges savoureux, pour des évocations du passé de l'un et de l'autre, pour faire revivre les démons qui les tourmentent, pour exposer ce qui compte pour chacun d'eux, pour échanger sur leur statut de réfugiés ou sur les aléas d'une guerre à venir. Et, au travers ces discussions, Dali, mettant de l'avant son caractère fantasque, malgré la modération que tente de lui imposer Gala, insiste pour exposer à Freud sa méthode paranoïaque-critique.
Toute cette rencontre constitue un magnifique débat d'idées et Clémence Boulouque nous permet d'y être conviés.
Anna repense à la plaisanterie familiale sur ce grand-oncle, un commerçant qui parlait une multitude de langues, mais toutes en yiddish. [C.B.]
Les nazis sont aussi idiots que corruptibles, soupire Zweig. Tellement corrompus et imbéciles que la plupart d’entre nous sommes partis du principe que n’importe quelle personne sensée ne voterait jamais pour ce type d’individus. Que c’était l’histoire d’une saison de vulgarités et de tapageurs. Et c’est précisément à cause de cela que toute la tragédie a pu s’enclencher, à petite vitesse, sous nos yeux. [C.B.]
— Vous allez beaucoup aimer, s’émoustille Dalí. Chez l’arrrrrière-petite-fille du marrrrquis de Sade, dit-il en roulant des consonnes et des yeux. [C.B.]
L’Amérique est une erreur. Une erreur formidable, peut-être – néanmoins une erreur. [C.B.]
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