Laurent Kropst avale son bol de lait, glisse sur la rampe de l'escalier tournant de son foyer de pierres et s'imprègne de l'humidité des pavés du dehors, tout juste lavés par les services municipaux de propreté. [E.A.]
Mon expérience d'études universitaires en mathématiques se situe dans un autre lieu, dans une atmosphère très différente, avec une approche bien distincte en ce qui regarde la compétition et la hiérarchie. Le contexte était tout autre, mais, tout de même, la lecture de ce premier roman d'Emmanuel Arnaud m'a replongé dans cette époque où je partageais avec mes collègues le bonheur d'une résolution accomplie, le ravissement devant une démonstration bien ficelée, le plaisir esthétique ressenti face à l'élégance mathématique, l'étincelle de joie lorsque l'intuition était fructueuse. Cela m'a rappelé les différences dans les approches qu'on pouvait avoir devant un problème à résoudre. Certains se lançaient selon le premier angle perçu dans des calculs à ne plus finir, ils utilisaient une force brute pour attaquer le problème jusqu'à ce qu'une solution se présente, quelle qu'en soit l'allure. D'autres méditaient devant le problème, cherchaient l'interstice par lequel se faufiler, tentaient de voir plus grand que le contexte du problème, cherchaient la belle solution, celle devant laquelle on ne pouvait que s'exclamer. Parfois, l'éclair ne venait pas, mais lorsqu'elle se présentait, cela devenait l'évidence, une évidence raffinée, et on se demandait comment il était possible d'être passé à côté tant de fois sans la voir.
Pour en revenir au roman d'Emmanuel Arnaud, on accompagne Laurent Kropst dans sa formation de maths-sup à Louis-le-Grand. Il est confronté à la compétition en vue d'atteindre les grandes écoles. Le roman porte plus sur l'environnement brut des élèves que sur l'expérience d'études des mathématiques bien qu'on trouve de belles descriptions de l'intuition et des divers fonctionnements face à un examen. Kropst sera séduit par une autre version du monde, celle des filles des classes littéraires. Il trouvera peut-être là une solution à son problème de notes. Voilà donc un roman agréable qui décrit une expérience de découverte et d'initiation.
[...] il est sur le point de tousser lorsque brusquement, comme par magie, il reçoit cette offre de la pensée aléatoire qu’on appelle parfois une “illumination”. Il regarde les équations gigantesques inscrites sur ses feuilles volantes, l’“ENTROPIE”, la “THERMODYNAMIQUE”, le “SECOND PRINCIPE”, les sommes infinies, les alignements grecs. Il vient de songer une seconde, une seconde seulement, de façon détachée à son “intuition”. Il a été extérieur à lui-même pendant un laps de temps infime, mais cela a suffi. [E.A.]
Je ne suis pas Cédric Villani. Je suis un simple sup à Louis-le-Grand, c’est-à-dire une grosse branche informe. Mais une branche également infiniment maligne… [E.A.]
Tous ces romans que lisent les khâgneux ne sont pas seulement des histoires, ce sont des modes d’apprentissage du monde. Ce ne sont pas seulement des plaisirs, ce sont des exemples. Les livres sont les modes d’apprentissage des voies de traverse de la vie, voilà pourquoi elle me les fait lire… [E.A.]
Est-ce que les mathématiques n’auraient donc toujours été pour lui qu’un simple vecteur de “rébellion” ? [E.A.]
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