Quelques heures avant l’enterrement de ma mère, l’après-midi où on la veillait, et alors que l’usage aurait voulu qu’on expose son cadavre, mon père donna l’ordre de laisser le cercueil fermé. [E.B.]Voilà un livre mystérieux, un roman en partie autobiographique qui navigue entre les concepts d'identité, d'altérité, de migration, de paternité et d'écriture. Eduardo Berti constate à la mort de son père, un Roumain réfugié en Argentine, que celui-ci tentait d'écrire en espagnol un roman à propos d'ouvriers roumains. Le fait ainsi d'écrire dans la langue de son pays d'accueil l'amène à tracer un parallèle avec un de ses projets, celui de tracer le parcours de l'auteur polonais et britannique Joseph Conrad (Józef Konrad) qui écrivait pour sa part en anglais. Voilà autant d'occasions, en parlant de son père, de Conrad ou du livre qu'il est en train d'écrire, de s'exprimer sur la langue, sur la littérature, sur le statut d'écrivain et sur le fait d'être étranger en son monde tout en portant en soi toute une bibliothèque. Voilà un auteur, membre récent de l'Oulipo, dont j'ai bon espoir de croiser encore l'œuvre sous peu.
À l’époque, j’aimais bien la notion selon laquelle la « patrie » d’un écrivain est sa langue natale. Aujourd’hui, avec plus d’ancienneté comme étranger, je préfère l’idée que son véritable pays se trouve dans ses livres : ceux qu’il a lus ou désire lire (sa bibliothèque), ceux qu’il a écrits ou rêve d’écrire (certains appellent cela une « œuvre »). [E.B.]
Les lecteurs cherchent et voient les ressemblances entre les livres, nombreux ou non, d’un écrivain ; l’écrivain, de son côté, voit surtout leurs différences. [E.B.]
Je n’ai pas lu Jouhandeau : il fait partie de la longue liste d’écrivains que, je suppose – sauf miracle ou cas de force majeure – je ne lirai jamais ; c’est impossible, il faudrait vivre mille ans ou, plutôt, ne pas vivre et ne faire que lire, lire et lire. Lire qui, d’accord, est aussi vivre. Mais qui ne l’est pas si on ne fait que ça. [E.B.]
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