La première fois que tu m'as vue, j'avais une heure. [A.B.L.]De mes dernières lectures, voilà sans aucun doute celle qui m'a le plus marqué. Un œil sur une histoire du Québec, un œil sur une histoire de l'art au Québec, un œil sur l'intime, un regard sur une relation particulière, sur un abandon en forme de fuite vers la liberté, sur une attache qui n'a pas vécu.
L'auteure, Anaïs Barbeau-Lavalette, s'adresse à la deuxième personne du singulier à sa grand-mère, Suzanne Meloche, poète du mouvement automatiste, rebelle, militante, passionnée, amoureuse de liberté. Cette forme particulière choisie par l'auteure génère une écriture directe faite de courtes phrases rythmées comme s'il s'agissait d'un dialogue. Mais, il n'y a pas de dialogue, il n'y a pas eu de dialogue. L'auteure n'a pas vraiment connu sa grand-mère et c'est grâce à de multiples recherches qu'elle peut maintenant lever le voile sur quelques éléments du parcours de celle qui n'a pas été en mesure de vivre mère ni grand-mère.
Comment as-tu fait pour ne pas mourir à l'idée de rater ses comptines, ses menteries de petite fille, ses dents qui branlent, ses fautes d'orthographe, ses lacets attachés toute seule, puis ses vertiges amoureux, ses ongles vernis, puis rongés, ses premiers rhums and coke? [A.B.L.]Anaïs Barbeau-Lavalette n'aimait pas cette femme qui avait abandonné sa mère alors qu'elle était enfant. Pourtant, après sa mort, elle ressent le besoin de la retrouver, de la dire et de reconstruire ce volet manquant dans l'histoire de sa famille.
Je me suis vu happé par cette lecture, happé par le regard sur le Québec des années 40 et 50, happé par un parcours personnel fait de fuites, happé par la reconstitution d'une relation entre l'auteure et sa grand-mère.
Anaïs Barbeau-Lavalette conclut : Tu ne pourras plus t'enfuir.
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