samedi 20 août 2016

Mayonnaise - Éric Plamondon

 Puis un jour j'y suis arrivé. J'ai réussi à faire une mayonnaise. [É.P.]
À l'occasion d'une visite très appréciée de la toute nouvelle et magnifique Maison de la littérature à Québec, je m'attarde à un présentoir et j'y trouve en montre ce volume II de la trilogie 1984 d'Éric Plamondon, Mayonnaise. Au moment de sa sortie en librairie, il m'avait intrigué, mais, sans savoir pourquoi, son clin d’œil n'avait pas été suffisamment convaincant pour que je me l'approprie. Dans une disposition, ce jour là, plus qu'adéquate, je feuillette donc l'ouvrage et m'assoie confortablement pour en débuter une lecture intéressée. Je découvre alors une écriture particulière, faite de fragments, de minuscules réflexions, de tranches de vie, d'éléments d'histoire, de poésie en haïku, de miniatures d'essai. Bien appâté, cette fois-ci, j'en conclurai que je dois lire Mayonnaise.

Dans les jours qui suivent, je plonge. Sur quoi portent donc ces morceaux d'écriture qui m'avaient attisé? Sur le personnage de Gabriel Rivages et ses questionnements existentiels, sur son engouement pour l'écriture et la vie mouvementée de Richard Brautigan, le dernier des beatniks, et ... sur la façon de faire lever une mayonnaise.

À quarante et un ans, je ne serai jamais quelqu'un d'autre que moi-même, Gabriel Rivages.
Ai-je pour autant raté ma vie?
  [É.P.]
Il faut que j'avoue, je ne connaissais pas Richard Brautigan, ni son livre le plus populaire La pêche à la truite en Amérique. Plamondon et Rivages m'auront fait découvrir et apprécier cet auteur iconoclaste.
Dans l'euphorie générale, Brautigan reprend le micro et s'exclame : " I love chaos! ".  [É.P.]
Plus j'en apprenais sur Brautigan et plus je m'avançais dans la lecture de Mayonnaise, plus je comprenais que Plamondon avait adopté le style et la façon de Brautigan pour en parler. Comme le mentionnait un libraire du Port de tête : « Ça ressemble à du Brautigan, ça parle de Brautigan, ça goûte le Brautigan, mais ce n'est pas du Brautigan. C'est le Mayonnaise, et c'est très bon. »
Brautigan écrit comme il pêche. Il nous appâte avec un détail et file dans la vie et la mort. Au dernier moment, il ferre d'un trait d'humour. Il nous tire de la rêverie comme une truite hors du torrent. [É.P.]
J'ai couru chercher La pêche à la truite en Amérique de Richard Brautigan.

Est-ce que je peux conclure en précisant que j'ai apprécié cette Mayonnaise? Je crois assurément qu'elle a bien pris.
Il y a deux sortes d'écrivains. Ceux qui ont du talent et ceux qui ont besoin d'une bonne psychanalyse. [É.P.]

jeudi 11 août 2016

Le Pendule de Foucault - Umberto Eco

[Archives Juillet 1990]
C'est alors que je vis le Pendule. [U.E.]
J'avais adoré la façon dont Eco nous faisait pénétrer dans le monde des abbayes du XIVe siècle dans Le Nom de la Rose. Comment, à travers ce polar moyenâgeux, il nous faisait découvrir toutes les subtilités théologiques de l'époque de l'Inquisition. C'était magistral.

Et le maître (celui qui enseigne) y est allé d'une deuxième séance. Mais le cadre s'est déplacé. La quasi unité de lieu, d'espace et de temps qu'on observait dans Le Nom de la Rose n'est plus ici de mise.

L'histoire débute un 23 juin 1984 à Paris, mais est aussitôt mis de l'avant un long, très long, flash-back qui nous ramènera aux années 70 à Milan.

L'auteur, c'est-à-dire le narrateur, Casaubon, est un spécialiste de l'histoire des Templiers. Et, c'est ce monde flou, mystérieux, secret, caché qu'il nous amène à connaître à travers cette histoire des Templiers, des Rose+Croix, de la franc-maçonnerie, en passant par les rites umbanda du Brésil. Le Pendule de Foucault, c'est une fenêtre sur un ensemble de connaissances mystiques et hermétiques. Je me suis surpris à feuilleter un livre sur la franc-maçonnerie dans une librairie! J'y ai retrouvé les hauts grades du rite écossais que mentionnait Eco.

Le Pendule, c'est l'histoire d'une passion, d'une invention passionnelle qui prend forme dans une certaine réalité et qui amènera trois comparses devant une évidence : toute vérité n'est pas bonne à créer.
Quelques Hauts grades de la Maçonnerie de Rite Écossais Antique et Accepté : Maître secret, Maïtre parfait, Chevalier de la Royale Arche de Salomon, Grand Écossais de la Voûte sacrée, Chevalier d'Orient et d'Occident, Prince Chevalier de Rose-Croix, Chevalier de l'Aigle et du Pélican, Sublime Écossais de la Jérusalem Céleste, Grand Élu Chevalier Kadosh, ... [U.E.]
_________________________

Sur Rives et dérives, d'Umberto Eco, on trouve aussi  :

Eco

Umberto

Numéro zéro

20/04/2017

Eco

Umberto

Vertige de la liste

11/02/2022


vendredi 5 août 2016

Sapiens, une brève histoire de l'humanité - Yuval Noah Harari

Il y a environ 13,5 milliards d'années,la matière, l'énergie, le temps et l'espace apparaissaient à l'occasion du Big Bang. [Y.N.H.]
C'est une aventure en vol plané au-dessus de l'histoire, à laquelle nous convie Yuval Noah Harari, cet historien de l'Université hébraique de Jérusalem. Avec une capacité étonnante d'aborder l'humanité sous un angle macroscopique, il nous offre une vision globale de l'évolution de l'homo sapiens. Il s'attarde, il va de soi, sur les premiers moments de l'homo sapiens en présentant des hypothèses intéressantes sur les éléments qui auraient contribué au fait que Sapiens soit encore là alors que Néanderthal ou l'homme de Flores nous ont quittés. Il avance que ce serait la capacité de Sapiens à imaginer des fictions qui lui a permis de faire collaborer des ensembles toujours plus importants d'individus autour des mêmes idées. Ces fictions, ce sont notamment les religions, les monnaies, les entreprises commerciales, ... Il abordera ainsi les grandes révolutions de l'humain, la révolution cognitive qui aura permis à sapiens de communiquer de façon efficace, la révolution agricole, les grands facteurs unificateurs que sont la religion, l'argent et l'empire, la révolution industrielle et scientifique. Sur tous ces éléments, Harari porte un regard global et critique qui parfois heurte nos façons de voir les choses, mais il amène ses arguments de si belles manières et il démontre un tel talent de vulgarisateur qu'on ne peut que s'incliner et faire le constat que l'auteur vient de nous faire vivre une aventure palpitante de plusieurs millénaires.
Aujourd'hui encore, malgré nos technologies avancées, plus de 90% des calories qui nourissent l'humanité proviennent de la poignée de plantes que nos ancêtres domestiquèrent entre -9 500 et -3 500 : blé, riz, maïs, pommes de terre, millet et orge. [Y.N.H.]
Depuis des milliers d'années, philosophes, penseurs et prophètes ternissent l'argent et en font la racine de tous les maux. Quoi qu'il en soit, la monnaie est aussi l'apogée de la tolérance. [...] Grâce à l'argent, même des gens qui ne se connaissent pas et ne se font pas confiance peuvent tout de même coopérer efficacement. [... Mais] quand tout est convertible, quand la confiance dépend de pièces anonymes et de cauris, elle corrode les traditions locales, les relations intimes et les valeurs humaines, pour les remplacer par les lois froides de l'offre et de la demande. [Y.N.H.]
Dans les cercles universitaires, beaucoup sont naïfs au point de croire à la science pure. Ils croient l'État et les entreprises assez altruistes pour leur donner de quoi poursuivre leurs projets de recherche au gré de leur fantaisie. Or, la réalité du financement de la science est bien différente. La plupart des études scientifiques sont financées parce que quelqu'un estime qu'elles peuvent aider à atteindre quelque but politique, économique ou religieux. [Y.N.H.]
Dans les derniers chapitres, il examine le rythme effarant des dernières révolutions et il se pose une question essentielle. Ces révolutions contribuent-elles à l'avancée du bonheur au coeur de l'humain? Enfin, il dresse un portrait inquiétant de l'éventuel futur de l'homo sapiens.
Voici soixante-dix mille ans, Homo sapiens n'était encore qu'un animal insignifiant qui vaquait à ses affaires dans un coin de l'Afrique. Au fil des millénaires suivants, il s'est transformé en maître de la planète entière et en terreur de l'écosystème. Il est aujourd'hui en passe de devenir un dieu, sur le point d'acquérir non seulement une jeunesse éternelle, mais aussi les capacités divines de destruction et de création. [Y.N.H. En épilogue]

On peut voir ici une conférence Ted de l'auteur : Comment expliquer l'ascension de l'homme? http://bit.ly/2aOc57R

____________

Sur Rives et dérives, on trouve :

Harari

Yuval Noah

Homo Deus, une brève histoire de l’avenir

29/05/2019

Harari

Yuval Noah

Sapiens, a graphic History, The Birth of humankind

09/07/2021


jeudi 28 juillet 2016

Alfred Jarry - Ubu et la 'pataphysique

[Archives Décembre 1989]

J'ai rencontré Ubu, je crois, vers la fin de mes études secondaires. Ma copie de Tout Ubu date du milieu des années 70. Mais, j'en avais lu plusieurs extraits précédemment. Pour ce qui est du Docteur Faustroll (Gestes et opinions du docteur Faustroll, 'pataphysicien), j'en avais lu l'intégrale vers 1975, ma copie date toutefois de 1981, année où je l'ai relu. J'ai lu Les jours et les nuits vers 1987-1988, cela m'est apparu comme un roman plus ardu.

Ubu et Faustroll (y compris le grand singe papion Bosse-de-nage, lequel ne savait de parole humaine que : « Ha Ha ») font partie de mes fétiches littéraires découverts par le biais de Vian (Boris), 'pataphysicien émérite (il était Équarisseur de première classe au Collège de 'Pataphysique).

La compagnie de théâtre Ubu qui s'est attardée au théâtre de l'absurde, entre autres, m'a fait revivre quelques bons moments avec le Père Ubu et la mère Ubu dans Ubu cycle (1989).

La 'pataphysique, [cette science des solutions imaginaires qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité], a donné naissance à l'Ouvroir de littérature potentielle (l'Oulipo) qui est une source inextinguible de plusieurs de mes lectures. On a donc là une branche relativement simple dans l'arbre de mes explorations littéraires.

jeudi 14 juillet 2016

Naufrage - Biz

Marieke Van Verden, quarante et un ans, accouche, le visage déformé par la douleur, elle pousse en hurlant. Frédérick Limoges, trente-neuf ans, l'encourage en lui épongeant le front. Il est dépassé, par les événements. [B.]
J'ai eu de la difficulté à lire Naufrage. Non par le style ni par l'écriture, qui coule très bien et qui a la simplicité que certains écrivains de Québec que j'aime bien sont capables d'atteindre. Naufrage, je l'ai perçu tel un drame en plusieurs stades. Le premier, celui de la déchéance dans le travail, de la dérive sur une tablette des archives, bien que supportable, décrit bien ce que plusieurs fonctionnaires vivent quotidiennement dans le marasme de la logique uniquement bureaucratique de décisions discrétionnaires et ministérielles sans fondement.

Puis, j'ai vu venir le second drame, l'ultime. J'ai posé les freins à ma lecture. Je n'étais pas prêt à affronter la suite. La couverture de Naufrage m'a interpellé pendant quelque trois semaines avant que j'accepte de poursuivre.

J'ai alors accompagné Frédérick dans ce qui le détruira complètement, dans sa culpabilité, dans les accusations qui lui sont portées et qu'il s'afflige, dans son couple qui ne peut survivre, dans son être qu'il n'est plus en mesure de contempler.
Je m'endors dans ma tanière, avec un Traité de sémantique appliquée à la gouvernance organisationnelle en guise d'oreiller. [B.]
J'ai bien fait de terminer cette lecture, l'imagination qu'elle comporte confère au drame une touche de vie inventée, mais de vie tout de même.