lundi 8 octobre 2012

Le salut de l'Irlande - Jacques Ferron

[Archives, août 1993]
Un vendredi, à la nuit close, je rentrais à pied à la maison, comme j'avais l'habitude de le faire chaque semaine; je venais du collège des frères des Écoles Chrétiennes, à Longueuil, où j'étais pensionnaire. [J.F.]
J'ai renoué avec le docteur-conteur, Ferron, avec une pointe de nostalgie. Ce poète raconteur m'a entrainé dans les courants de la mémoire collective du Québec: un irlandais de deuxième génération se dépeint dans un St-Lambert naissant. Il narre la libération de l'Irlande qui pointe en lui et qui le mènera à se faire effelquois.

Ferron me charme littéralement. Il me guide dans les méandres du passé conté et du passé merveilleux. Ai-je déjà rencontré mon renard, moi qui suis, tel Connie Haffigan, un peu irlandais? Quel est l'animal totémique des Kavanagh?



dimanche 19 août 2012

Des gens très bien - Alexandre Jardin


Né Jardin, je sais qu'il n'est pas nécessaire d'être un monstre pour se révéler un athlète du pire. [A.J.]
Des gens très bien, c'est comme cela que Jardin qualifie son grand-père et les gens qu'il côtoyait, ces gens qui, au temps du gouvernement de Vichy, ont fait le choix d'y collaborer et, par ce fait, de collaborer avec l'Allemagne d'Hitler et ses visées purificatrices. Alexandre Jardin n'offre pas un roman, mais un cri pour se sortir d'un mal-être dans lequel sa famille l'avait plongé. Mais en poussant ce cri, c'est toute une partie de la France qui a semblé réagir, c'est une partie de la France qui s'est senti mal de son passé. C'est donc une oeuvre à la fois très personnelle et à visée plus large que nous offre Jardin.  Cela aurait pu être plus court, plus direct, et ne pas présenter autant de répétitions, mais cela aurait-il eu le même impact? Jardin se fait plus sombre et plus intérieur que jamais, mais, chose importante, il utilise toujours sa plume agile. 

mercredi 15 août 2012

L'homme de la Saskatchewan - Jacques Poulin

- J'ai une drôle de nouvelle à t'apprendre, dit Jack. [J.P.]
Ce sont les sujets fétiches de Poulin qui offrent matière à ce court roman : la ville de Québec, l'écriture, le voyage et l'histoire de l'Amérique. C'est l'univers de Jack Waterman (c'est un nom de plume) qui reprend vie : Francis, son jeune frère, mais aussi la Grande Sauterelle de Volkswagen Blues et son minibus. Jack, consacré à l'écriture de son oeuvre majeure, accepte tout de même, d'être le nègre d'un joueur de hockey qui désire écrire sa biographie. Il refile plutôt le contrat à Francis dont ce sera la première expérience d'écriture. Tous les éléments sont en place pour permettre à Poulin d'y aller de sa poésie en prose et de faire des allers retours entre l'histoire de la Saskatchewan (terre d'origine du hockeyeur) et les découvertes amoureuses de Francis en la ville de Québec.

_________________


De Jacques Poulin, sur Rives et dérives, on trouve aussi:


Poulin
Jacques
L’anglais n’est pas une langue magique
Poulin
Jacques
La traduction est une histoire d’amour
Poulin
Jacques
Les yeux bleus de Mistassini
Poulin
Jacques
Un jukebox dans la tête 

lundi 13 août 2012

Le sourire de la petite juive - Abla Farhoud


Cette nuit, j'ai rêvé que j'avais autant d'enfants que de livres. [A.F.]
Il est étrange de se retrouver comme acteur ou figurant au coeur même d'un livre qu'on tient sur notre table de chevet. Il est étrange que son décor habituel, notamment sa rue, fasse office de toile de fond à un ensemble de portraits, un ensemble de clichés ou plutôt de fusains, de personnages qu'il nous semble avoir croisés la veille ou l'avant-veille. Il est étrange d'avoir à lire cette série de dessins, parfois aux traits un peu forts, de résidants d'un bout de rue qui est mon cadre de vie depuis trente ans. Le double littéraire d'Abla Farhoud se livre et décrit les êtres dont elle partage un certain quotidien et quelques mètres de trottoirs. Son regard alterne avec celui de la petite juive, petite juive hassidim, dont, même après trente ans, on ne peut qu'imaginer la pensée tant sa communauté demeure en marge de la nôtre. On a ainsi devant soi une série de courts textes chacun cernant de façon plus ou moins précise l'univers imaginé ou recréé de quelques habitants d'une rue qui se situe à la frontière du Mile End et d'Outremont, à la frontière entre la réalité et l'imaginé.

____________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Farhoud

Abla

Au grand soleil cachez vos filles

13/06/2017

Farhoud

Abla

Havre-Saint-Pierre

15/10/2023


samedi 12 mai 2012

Makers - Cory Doctorow


Il y a de ces livres qui me poussent à arrêter de lire pendant un moment, qui nécessitent une digestion en bonne et due forme. Makers de Cory Doctorow en est.

C'est un livre qui va aussi vite que le présent, un livre un peu cynique, ce que j'apprécie rarement dans la littérature - il me fallait bien une exception.

Il y est question de la culture Maker, le Do it yourself de l'électronique, qui m'attire depuis un moment même si je n'ai aucun talent manuel ni de connaissance en électronique. Ce qui y apparaît dans toute sa gloire, c'est l'inventivité. De deux génies normaux, premièrement, des artistes, des créateurs. De la masse, ensuite, de tous ces gens qui ont des idées sans avoir les moyens de les réaliser, qui ont des talents complémentaires mais qui ne se rencontrent pas. On y voit un bouillonement rendu possible par une grande initiative capitaliste, la créativité propulsée par la logique du retour sur investissement rapide, de l'occupation précoce d'une niche de marché avant de se retirer aux premiers signes d'une compétition. Et l'humain, tout de même, qui ne baisse pas les bras lorsqu'il voit ce rêve, que Doctorow nomme le New Work, détruit par le mouvement capitaliste même qui l'a rendu possible. L'humain qui persiste dans une jungle qui n'est pas faite pour ses rêves, qui collabore, dans tous les sens du terme.

Dans ces mots transparaît également un thème cher à Doctorow, celui de la culture libre, ici principalement sous la forme de logiciel libre (qu'on peut librement utiliser, partager, modifier, etc.), qui est un des éléments qui s'oppose dans le livre à la mainmise du capitalisme sur la créativité. Justement, Doctorow rend Makers disponible librement (et gratuitement) sous forme de e-book.

Et puisque je me suis remis à lire, je vous parlerai peut-être prochainement, dans un tout autre ordre d'idée, de Gloire incertaine, de Joan Sales, sur la guerre civile espagnole en Catalogne.