dimanche 14 février 2010

Des archives...

À l'automne de l'année de grâce 1989, à Montréal, je débutais l'écriture tout à fait intimiste d'un petit cahier où je me promettais de livrer à la blancheur des pages quelques impressions sur des lectures qui m'ont marqué, des lectures qui m'ont influencé, qui m'ont troublé, qui m'ont fait réfléchir, qui m'ont porté à m'essayer à l'écriture, qui m'ont formé et déformé, qui m'ont fait vivre et rêver. Cela ne constitue pas d'ultimes critiques, ce sont plutôt des notes placées à l'avenant dans un agenda de rencontres livresques qui se dessinent au gré des influences des proches et des découvertes fortuites.

La relecture de ces notes regroupées dans quelques cahiers m'incite à les partager. En fait, Rives et dérives est devenu, pour moi, le prolongement virtuel de ces petits cahiers. Voilà donc un lieu bien choisi pour tirer du néant et du bas d'une armoire des morceaux choisis extraits D'une lecture à l'autre, cahiers de factures diverses s'étalant sur quelques décennies.

J'identifierai les messages issus de ces cahiers en les datant et en leur attribuant un libellé Archives. J'espère que vous apprécierez ces quelques incursions dans mon passé de lecteur.

Jean-Luc

La trilogie berlinoise - Philip Kerr

Ce matin, à l'angle de Friedrichstrasse et de Jägerstrasse, je vis deux hommes, deux SA qui démontaient une des vitrines rouges où est affiché chaque nouveau numéro du Stürmer. (P.K.)
La Trilogie Berlinoise est constituée de trois moments dans le parcours de Bernhard Gunthe, trois aventures de ce détective privé - ex-policier, trois moments de l'Allemagne du XXe siècle, trois périodes dans l'aventure nazie du IIIe Reich, 1936, 1938 et 1947. Ce polar historique nous fait vivre dans un quotidien où l'antisémitisme prend place, se développe jusqu'à l'inimaginable et se résorbe sous les tractations d'ex-SS, pseudo-défenseurs de la liberté capitaliste devant un communisme montant.

Le premier «livre», L'été de cristal, nous fait découvrir les rues d'un Berlin qui se prépare pour les Jeux Olympiques. À la lecture de certaines descriptions, je me suis souvenu comment mon fils m'avait relaté sa première visite à Berlin et l'impression qui se dégageait de l'architecture urbaine de cette capitale.
Les bâtiments publics de cette ville étaient incroyables. Ils ressemblaient à d'immenses montagnes de granite gris, une énormité destinée à rappeler l'importance de l'État et la quantité presque négligeable que représente un pauvre individu. Cela pourrait expliquer en partie la façon dont cette histoire de national-socialisme a commencé. Il est difficile de ne pas être impressionné par un gouvernement, quel qu'il soit, dont les services sont installés dans des bâtiments aussi grandioses. Et les longues et larges avenues qui reliaient les différents quartiers semblaient n'avoir été conçues que pour pouvoir y faire manœuvrer des colonnes de soldats. (p.354)
C'est également dans ce premier livre qu'on découvre ceux et celles qui furent appelés les Violettes de Mars : ceux et celles qui se sont découvert des affinités nazies au moment où cela commençait à devenir important, allant même jusqu'à tenter d'obtenir des cartes portant de petits numéros pour feindre une adhésion précoce.

Et l'aspect architectural du quotidien revient dans le livre trois, Un requiem allemand :
Dans beaucoup de quartiers, un plan des rues n'était guère plus utile qu'une éponge de laveur de carreaux. Les artères principales zigzaguaient comme des rivières au milieu de monceaux de décombres. Dessentiers escaladaient d'instables et traîtresses montagnes de gravats [...].Les boussoles étant introuvables, il faillait beaucoup de patience pour s'orienter dans ces fantômes de rues le long desquelles ne subsitaient, comme un décor abandonné, que des façades de boutiques et d'hôtels [...].  (p.553)
Les aventures policières de Bennie Gunther laissent un goût d'amertume envers l'histoire. La distance que Gunther met entre lui et les responsables de cette horreur s'amenuise et le sentiment de culpabilité le rejoint. Heureusement, tout cela se profile au travers un polar bien mené et le héros, narrateur au je, se permet des écarts et des figures de style souvent surprenantes. La fascination que génère La Trilogie Berlinoise se transmute-t-elle dans la suite La Mort, Entre Autres ?

_______________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Kerr
Philip
La mort, entre autres 


lundi 1 février 2010

Des papous.... dans nos têtes !

Nous y voilà enfin !

C'est pas un livre, pas une expo, ni une pièce de théâtre mais ça fait voyager pareil !

En plus, étant radiophiles (et photogruegraphes mais on vous en reparlera dans un autre post(e)), on adore leurs façons de titiller la glande littéraire.

Des papous dans la tête, c'est une émission de radio diffusée le dimanche vers 12h sur France Q (Q comme qulture), où des amoureux de la langue propagent leur folie des mots. On se fait bercer par leurs chansons, leurs lettres de personnages célèbres, leurs réécritures de textes à la manière de, leurs poèmes reconstruits, tous empreints d'un humour à toute épreuve !

Alors c'est comme ça qu'à chaque dimanche, on s'retrouve nez à nez avec la vieille radio, les oreilles bien propres et le cerveau sur ON à écouter attentivement les mots qui se baladent dans la cuisine. En tous cas, ça sent bien bon et ça donne faim. Et ça nous donne des envies de créer en groupe, de se lancer des défis, de mettre sur papier les idées les plus folles accompagnées de contraintes incongrues.

Alors pour la nouvelle année, on s'est dit qu'on allait se déguiser en Papous ! Vous êtes des nôtres ?

Vive la radio en ces temps d'images !

Sharlaine et Alex

En passant, vous pouvez écouter les dernières émissions sur le site des papous dans la rubrique "Archives".

samedi 9 janvier 2010

Tarmac - Nicolas Dickner


Août 1989. Ronald Reagan avait quitté la Maison-Blanche, la guerre froide tirait à sa fin et la piscine extérieure était (encore une fois) fermée. Cause de la contrariété : un bris de tuyaux. (N.D.)
La fin du monde est au centre de ce roman. En fait, c'est plus son moment et la date de son avènement qui intéressent les protagonistes de Tarmac que sa nature. On ne saura jamais de quoi sera fait le déclencheur de cette fin du monde. Mais, la quête de sa date aura joué un rôle non négligeable dans l'univers louperivois de deux adolescents qui découvrent la vie tranquillement installés devant un film de zombies diffusé sur l'écran d'une télé du sous-sol, le bunker. De ce sous-sol, Hope Randall, fidèle à sa lignée à l'équilibre instable, sera projetée à l'autre bout du monde et Mickey se préparera seul à affronter l'apocalypse.

Le monde créé par Dickner est un monde où s'entremêlent réalité, rêverie, science et illusion. C'est dans ce méandre romanesque que déambulent Hope et Mickey, les Randall et les Bauermann ainsi qu'une fin du monde appréhendée.

______________________

Sur Rives et dérives, on trouve aussi :

Dickner
Nicolas
L’Encyclopédie du petit cercle 
Dickner
Nicolas
Le scandale de Zacharias Ascaris 
Dickner
Nicolas
Six degrés de liberté 

mardi 15 décembre 2009

BD 2009


Si j’apprécie aussi énormément les délires de Philémon, je découvre avec beaucoup de plaisir la BD associée à un courant plus réaliste et intimiste. L’hiver dernier, j’ai plongé avec délice dans la série Le combat ordinaire du bédéiste Manu Larcenet. J’y ai trouvé quelques airs de parenté avec les Paul de Michel Rabagliati, dont l’inclusion d’éléments autobiographiques, mais avec un personnage principal (photographe) plus jeune et beaucoup plus angoissé. Une série en quatre tomes qui se lit trop vite. Mon deuxième coup de cœur de 2009 va à Lulu femme nue (premier livre). L’auteur s’appelle Étienne Davodeau. Une BD construite comme un scénario de film : des copains réunis sur une terrasse racontent le décrochage de leur amie Lulu, mère de famille, sans emploi, la quarantaine qui, sur un coup de tête, s’est évadée quelque temps sur la côte vendéenne. Le tome 2 n’est pas encore achevé, mais on peut suivre sa progression ici. Déjà sur ma liste d’achats, en tout cas. Vue, mais pas encore lue, cette autre BD bien tentante du jeune Bastien Vivès : Dans mes yeux a été entièrement dessinée aux crayons de bois (genre Prismacolor). L’histoire qu’elle propose est rendue par une sorte de caméra subjective : le regard du lecteur est celui du personnage principal. Intrigant. …Et puis tant d’autres belles, originales et invitantes BD entraperçues au hasard d’une visite chez Renaud-Bray ou ailleurs. Grosse liste au père Noël en perspective…!