dimanche 26 juillet 2009

La route - Cormac McCarthy

Quand il se réveillait dans les bois dans l'obscurité et le froid de la nuit il tendait la main pour toucher l'enfant qui dormait à son côté. (C.McC.)

Quel univers que celui, sec, dévasté et gris de McCarthy! Il est très difficile de décrire ce livre. Le père et le fils marchent. Ils marchent dans une Amérique détruite, brulée et ensevelie. Ils marchent à la recherche du bleu de la mer, à la recherche de la sérénité perdue, à la recherche d'un passé presque oublié. McCarthy a, par ce livre, exploré les sentiments profonds d'un homme face à la désolation, face à l'inimaginable et pour qui son fils constitue le seul lien avec ce qui reste de la vie. La route est un roman dépouillé qui déstabilise autant par sa forme que par son objet.

samedi 13 juin 2009

Comment parler des livres que l'on n'a pas lus? - Pierre Bayard



Né dans un milieu où on lisait peu, ne goutant guère cette activité et n'ayant de toute manière pas le temps de m'y consacrer, je me suis fréquemment retrouvé, suite à ces concours de circonstances dont la vie est coutumière, dans des situations délicates où j'étais contraint de m'exprimer à propos de livres que je n'avais pas lus.
(P.B.)

C'est la première phrase de cet ouvrage, mais il faut aussi mentionner la citation d'Oscar Wilde que Pierre Bayard met en exergue:
Je ne lis jamais un livre dont je dois écrire la critique; on se laisse tellement influencer.

Pierre Bayard cache bien sa provenance, car ce livre dont le titre peut faire sourire démontre une grande connaissance du monde des livres et de ses diverses bibliothèques. P.B. en souligne d'ailleurs trois :
  • la bibliothèque collective : l'ensemble large de tous les livres déterminants sur lesquels repose une certaine culture à un moment donné. Bayard insiste sur le fait que le lecteur ou le non-lecteur doit pouvoir s'orienter dans la bibliothèque collective et pour ce faire la lecture intégrale n'est pas essentielle;
  • la bibliothèque intérieure : sous-ensemble de la bibliothèque collective sur lequel notre personnalité se construit et qui organise notre rapport aux textes et aux autres, une bibliothèque où figurent quelques titres précis, mais qui est surtout constituée de fragments de livres oubliés et de livres imaginaires à travers lesquels nous appréhendons le monde;
  • la bibliothèque virtuelle définie comme un espace ludique de communication sur les livres dans lequel il est admis de parler de livres non lus ou seulement parcourus, un espace composé de livres-fantômes, objets insaisissables et mouvants que nous faisons surgir quand nous parlons d’un livre.
Bayard parle longuement du livre intérieur, celui que, moi, j'ai intégré. J'ajouterais celui que j'ai créé, car pour moi l'acte de lecture a toujours été un acte créateur. Le livre que j'ai lu n'est pas celui que vous avez lu, même s'il porte le même titre et les mêmes signes extérieurs.

Est-ce que j'ai mentionné que Pierre Bayard est psychanalyste et qu'il enseigne la littérature à Paris 8?

En parcourant les pages de cet ouvrage et les exemples de non-lectures tirés de la littérature ou du cinéma, un souvenir me hantait. Changement de décor m'avait déjà plongé dans ces réflexions sur les livres que l'on n'a pas lus. Ce roman de David Lodge, caricature pas très éloignée de la réalité du monde universitaire, présentait, en effet, un personnage, professeur nouvellement engagé dans une faculté de littérature anglaise, qui était initié à un jeu intellectuel assez paradoxal. Il s'agit d'avouer la non-lecture d'une oeuvre essentielle que tous doivent avoir lue. On marque un point lorsque nous sommes seul dans le groupe des joueurs à n'avoir pas lu l'oeuvre en question, le «jeu de l'humiliation».

Quelle n'a pas été ma surprise, lorsqu'à la page 113, Pierre Bayard cite lui-même ce jeu et livre un extrait de Changement de décor. Dans cet extrait, le jeune professeur va jusqu'à avouer sa non-lecture de Hamlet, ... dans un département de littérature anglaise...

En bref, Comment parler des livres que l'on n'a pas lus? est un livre à lire (ou non), mais absolument!

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lundi 18 mai 2009

Philémon - Fred


Rares sont les vaisseaux-théâtres,
trafiquants de souffleurs
pour ringards faméliques,
qui passent l'Atlantique
sans sombrer, quelle douleur,
victimes des critiques
des criticakouatiques...
(extrait d'un poème de Schariki le Dément,
plombier-poète du second A)

Je viens de relire avec délice l'épopée de Philémon sur les lettres de l'Atlantique, ce délire poétique de Fred, cet imaginaire débridé, cette invention onirique, cette inspiration fantasmatique. Quelle écriture! Quelle liberté avec la case et le cadre de l'album de bd! Existe-t-il des oeuvres récentes de la bédéthèque qui soient comparables? J'aimerais les connaître...

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Sur Rives et dérives, on trouve aussi :


Fred
Philémon, Le train où vont les choses... 


La mezzanine - Nicholson Baker

Il était presque une heure lorsque j'entrai dans le hall de l'immeuble où je travaillais et que je pris la direction des escalators. (N.B.)
On le présente en quatrième de couverture comme le petit cousin de Perec et de Queneau. Oui, mais il est surtout le cousin germain du Calvino qui a écrit Monsieur Palomar - que je dois relire au plus tôt. C'est ma deuxième lecture de La mezzanine et j'y ai retrouvé ce qui la première fois m'avait séduit, cette impression d'être carrément dans la tête du protagoniste. Protagoniste qui est d'abord l'employé de bureau (peut-être un cadre), mais qui de chapitre en chapitre devient de plus en plus l'écrivain conscient. Le chapitre 14, le pénultième, est une petite merveille de prose annotée sur la digression et la note de bas de page. On y lit : « les notes de bas de page sont les finitions qui permettent à des paragraphes tentaculaires de tenir bon face à la réalité plus large de la bibliothèque*. » On y trouve également une réflexion palomaresque sur la périodicité et la fréquence relative des idées. Jouissif. 

 * « Et pourtant le traité de style que j'avais à l'université mettait en garde contre de trop longues notes. »

samedi 2 mai 2009

La mathématique du chat de Philippe Geluck - Daniel Justens


J'ai découvert Le Chat récemment. Il existe pourtant depuis 25 ans. J'ai découvert Le Chat par la voie des blogues de mathématiciens. En effet, à l'occasion, l'un ou l'autre des blogueurs mathématiciens que je fréquente mentionnait une allusion mathématique du Chat. Cela m'a intrigué assez pour que j'y jette un coup d'oeil plus attentionné. Et ce coup d'oeil a été révélateur. Le Chat est un philosophe dont la pensée aborde tous les aspects de la nature humaine. Le Chat fait réfléchir, Le Chat fait également réfléchir sur la mathématique, et pas seulement sur le calcul de base, mais également sur ses fondements et quelques théories profondes. Surprenant? Allez consulter cette présentation PDF de l'auteur, vous y verrez quelques extraits du livre.